LE SOCIALISME SCIENTIFIQUE DANS LA
SEXOLOGIE
Serguei
Tarassov, croisé cet été dans une station balnéaire, est un homme d’affaires de
Pétersbourg en retraite depuis peu qui fait ses premières armes d’auteur. Pour
ses débuts, il a choisi d’aborder un des fronts les plus méconnus de la
Guerre Froide. Pour les russophones, au lien suivant:
http://new-writers.ru/index.php?option=com_content&view=article&id=999:2018-01-10-14-12-56&catid=44:-2018&Itemid=194
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Serguei Tarassov et TM |
(Traduit
par TM)
Cette histoire suscite le sourire jusqu’à
maintenant chez les auteurs d’éditions jaunies ronéotées, sorties à la fin des
années 1980 dans un institut technique de Leningrad. Comme chez l’homme
vieillissant, qui s’attend à ce que son potentiel guerrier s’éteigne, flamboient
brusquement des souvenirs de liaisons de courte durée mais intenses, suscitant
le sourire des années plus tard.
Et
même avec le temps, il est difficile de raconter ces évènements : trouver
des explications simples, dignes de confiance, jeter un coup d’œil de
l’intérieur sur tous ses aspects,
analyser de fond en comble les relations de cause à effet conduisant à des
conséquences inattendues.
Elle
commença après la déclaration au monde entier d’une dame sur l’émission
« Leningrad-Boston » au centre télé à Tchapygin, précisant qu’en
Union Soviétique, le sexe n’existait pas.
Certains
s’esclaffèrent sur l’ignorance de cette dame de la terminologie dans le domaine
des relations sensuelles, mais nous serons justes — à l’époque, les relations
intimes ne s’appelaient pas sexe.
D’autres,
plus âgés, se plongèrent dans la réflexion, se souvenant d’autres échos de
cette phrase. Chacun selon ses moyens, chacun selon ses exigences. Quelle
phrase prometteuse et pertinente ! Mais ensuite fut adoptée la loi sur le
parasitisme, car certains refusaient de travailler. Et après, beaucoup de
personnes « capables » refusèrent de travailler pour les feignants et
s’abaissèrent à leur niveau. Puis vint l’égalisation des salaires et des
retraites. Personne ne vivait mieux que ses parents. Travailler mieux n’avait
aucun sens. Comme on disait à l’époque : ils font semblant de nous payer, on fait semblant de travailler. Et
à nouveau. Quelle phrase aux échos assourdissants ! Le sexe n’existe pas
en URSS, mais, par quelque miracle, des enfants naissent, et on constate même
un accroissement de la population.
Cette
dernière chose devint vexante pour le pouvoir. L’Union Soviétique de la
Pérestroïka attendait des changements dans tous les domaines, y compris dans la
sexualité. Comment accueillait-on alors l’un des ravissements sensuels
intimes ? Bon, beaucoup de gens aiment respirer les parfums avant de les
acheter, pour déterminer celui dont ils ont besoin. Parfois, le parfum se répand
et leur monte aux narines. C’est à peu près ce qu’on appelait alors le sexe,
parce que c’est mauvais, honteux et à la fois très intime.
Le
thème officiel du sexe n’était pas interdit, mais en quelque sorte tabou,
chargé de culpabilité. Un comportement en partie amoral, lire, des liaisons
clandestines, qu’on examinait dans les collectifs de travailleurs, dans les
comités du parti. On n’était pas très loin de la Chine, où l’on exigeait des
habitants se livrant à des relations sexuelles l’approbation de leur lieu de
travail. Voilà d’où venait ce sentiment de honte lié au sexe, cette sensation
de salissure et cet effort pour limiter l’accès des masses au savoir dans le
domaine des relations sensuelles.
Dans
le but de la transformation des relations négatives de la société avec le sexe à
la télévision pour quelque chose de plus libre du conservatisme et de la
répugnance, un groupe d’initiative de candidats au doctorat lança un appel à
l’édition d’un recueil de travaux scientifiques, affirmant que le sexe existait
chez nous, avait existé, et existerai.
Le
message général de ces changements sociétaux avait une direction : il
était important pour les gens de prendre conscience que leur penchants
comptaient, que leur sexualité avait une importance significative, que leurs
désirs n’avaient rien de honteux. Au même titre qu’une culture éclairée sur le sexe, les vidéos et
revues occidentales déferlant sur le pays sur les éternelles relations entre
hommes et femmes comptaient dans ce recueil comme une part de bon sens créatif
pour les techniciens-candidats au doctorat.
Certains
articles étaient sérieux et solidement fondés. Ainsi, dans l’un d’entre eux on
affirmait que sous la pression du marché libre entrant dans le pays, la sphère
intime devenait une forme d’activité économique. Dont le but serait l’utilité
maximale en minimisant les risques et les devoirs inutiles. Les hommes et les
femmes, sujets du marché des relations, se rencontrent sur le « champ
sexuel ». Pour les hommes la stratégie optimale : ne pas entrer dans
des liaisons sérieuses et ne pas se charger d’obligations superflues. Pour les
femmes : un choix réfléchi de rencontres de sa moitié, le calcul des
risques et des conséquences possibles, comme un investissement à la bourse.
Dans ce face à face les femmes possèdent l’avantage : en effet, ce sont
elles qui choisissent et ce sont elles qui précisément donnent corps à cette
chair de l’amour dont les hommes ont besoin avant tout. Mais il est capital de
compter, qu’avec le temps, comme dans la chanson, « pour dix femmes
statistiquement… (dans les nouvelles conditions économiques désorganisées de la
majorité de la population)… il n’y aura pas neuf, mais seulement cinq ou six
mecs ». Et comme conséquence la plus déprimante pour le pays — la baisse
de la natalité. Ce qui conduit l’une des parties à une action motrice à
caractère matériel — la renaissance sous une forme ou une autre de
l’institution de la dot.
L’auteur
conseillait aussi aux femmes et aux hommes de ne pas sombrer dans le désespoir
et de se débarrasser des fantasmes suicidaires, si un adversaire se révèle plus
fort que soi dans un face à face concret. En effet, la plupart du temps, il
s’agit d’un mauvais choix, d’un manque d’informations sur la partie adverse,
d’un manque de préparation à une sortie sur le « terrain sexuel ».
Dans la démarche évoquée ici, en cas de
défaite, les paroles désagréables à l’encontre de l’adversaire, ne sont
également pas de mise. Il faut se servir d’exemples pris dans d’autres
domaines, où les relations entre adversaires sont strictement réglementées. Par
exemple, dans le sport : on sert la main de l’adversaire, on travaille sur
ses erreurs et l’on se prépare à la prochaine rencontre. La préparation,
d’après la réflexion de l’auteur, doit suivre le cours d’une modélisation de
l’amour — au cours de laquelle, simultanément avec l’instruction sexuelle, les adversaires potentiels doivent se
familiariser avec toutes les subtilités (l’art de la tendresse et des caresses)
de la transformation des relations physiologiques en chef-d’œuvre de la
communication sensuelle.
D’autres
— amusantes, notamment le « Coïtus interruptus », dans les conditions
du Grand Nord, on y décrit la sensation d’une union en plein air dans un climat
cruel et des relations ne s’achevant pas par la satisfaction mutuelle des
partenaires pendant l’aurore boréale par des températures loin au-dessous de
zéro. Les hommes qui ont pris une douche avec un gel ultra-mentholé savent que
celui-ci excite agréablement pendant quelques secondes, avant la phase de refroidissement
douloureux, où l’on a alors la sensation d’avoir mis le « doigt »
dans un verre rempli de glaçons.
Mais
on souhaiterait s’arrêter sur un des articles du recueil — « Technique et
moyens d’atteindre la résonance orgasmique ». Il était proposé par un
candidat au doctorat, enquêtant sur l’apparition de résonances néfastes dans
les systèmes complexes. Il est possible que vous ayez déjà connaissance de
cette histoire : une compagnie de grenadiers marchant au pas cadencé sur
le Pont Égyptien de Pétersbourg, provoqua son effondrement à un instant précis.
Cela se produisit en raison de la coïncidence de l’onde vibratoire du pont et
celle des pieds du détachement en marche.
On
exprimait dans cet article l’idée d’examiner l’orgasme comme une onde de résonance,
agissant dans le domaine du plaisir et du système nerveux central de l’homme.
Cette approche permettait à l’auteur de préciser le rôle de chacun des organes
impliqués dans ce processus, établir leur façon d’être reliés les uns aux
autres et décrire ce processus comme un système vibratoire à doubles contours.
Simultanément l’auteur se rendait compte que la sexualité humaine était
difficile à modéliser, car elle dépend de l’interaction de multiples facteurs
cognitifs, de mécanismes neurophysiologiques, se produisant dans le système
nerveux central et dans l’organisme entier.
La
science atteint rarement la perfection et rappelle en quelque sorte le musicien
de jazz jouant de nombreuses variations sur un même thème, pour choisir celle
qui lui semble la plus réussie. Pour une description mathématique des processus
se déroulant dans un biomécanisme complexe appelé l’humain, ce fut le moyen qui
sembla le meilleur à l’auteur. Plus loin, sachant que l’orgasme féminin peut-être
clitoridien ou vaginal, il se fixa la tâche de les déclencher simultanément.
Cette étape de la modélisation lui permit de trouver le point directeur
inconnu, et précisément l’onde et la longueur des forces extérieures entrant
dans son modèle, menant à la coïncidence des vibrations obligatoires en en
sortant. Lorsque l’amplitude des ondes de résonances de l’orgasme clitoridien
est multipliée quelque part avec celle de l’orgasme vaginal selon les
stimulations extérieures exercées par l’homme.
On
démontrait au couple zélé dans cet article qu’il existe un rythme précis des
relations sexuelles qui facilite de manière optimale la coïncidence des ondes
de ces vagues de résonances.
Le
centre de plaisir de la femme reçoit une impulsion explosive, comparable à
l’effet obtenu lors d’une augmentation brutale et inattendue du volume sonore dans
les écouteurs d’un appareil radio. À la différence des vagues sonores brutales
à arracher la tête, l’action simultanée des vagues orgasmiques un effet non pas
néfaste mais salutaire.
L’étudiant
affirmait aussi que le succès enregistré dans la rencontre des résonances
salutaires de l’orgasme ouvrait la voie à une nouvelle idéologie
sexuelle : l’union prédestinée de la science et de la femme dans l’idée imposante
d’atteindre un résultat quelconque ; élevait les contacts physiologiques
monotones et mécaniques à un niveau scientifique fondamental nouveau et
révolutionnaire dans le développement des éternelles relations de l’homme et de
la femme.
La
meilleure partie de l’humanité expérimentait ainsi non seulement une révélation
sensuelle et régulière puissante avec apothéose sous forme d’un éclair de
résonance orgasmique globale mais encore, à la suite de celle-ci : un
bond émotionnel retentissant, le ravissement et un afflux de forces inexpliqué.
Celui que par exemple, une victoire inattendue à la Coupe de la FIFA produit
sur le fan de foot.
Ce
qui pouvait conduire à augmenter la capacité de travail non seulement de la
population féminine mais aussi masculine. Car chez les hommes apparaissait le
désir de s’améliorer. Lorsque chacun, s’il n’est pas boutonneux, peut devenir
la source d’un bonheur féminin global. Il faut bien entendu qu’il y réfléchisse
et, prenant conscience, fasse un effort sur-lui-même. Et si des millions
d’hommes se lancent dans une transformation scientifique et fondamentale de
leur vie intime, alors, il fait peu de doute que cela mènera à la croissance
naturelle de la productivité, ainsi qu’à l’accroissement de la natalité. Et c’était,
affirmait l’auteur en conclusion, la solution finale en vue du développement
socio-économique du pays et de tout le peuple.
©
Serguei Tarassov , 2018.