À Antifixe, finalement, on est deux :
votre serviteur TM, et Vincent Deyveaux, l’expat de « Lettres de
Moscou ». Notre chère Kira ne fait que de rares apparitions. Combien de disparus… on dirait un bataillon de paras retour
d’une guerre coloniale. Vincent n’en fout pas une rame ces temps-ci, mais je le
comprends, ses vagabondages dans les coins perdus de l’Empire, dont il rapporte
des images stupéfiantes, sont tellement plus vitaux, que la tentative
fragmentaire, foutraque, et fumeuse de communiquer (avec qui, N de D, avec qui ?)
grâce à Antifixe. Ce matin, il a envoyé à votre serviteur un article sur un
incident ordinaire du monde du crime, le meurtre d’un des derniers lieutenants
de « Iapontchik » (lui-même liquidé quelques années après son retour en Russie quand il fut libéré des pénitenciers américains), dont les lecteurs russophones pourront lire l’original
au lien suivant :
Je soupçonne très fort que Vincent se
souvient que « Iapontchik » dont j’ai raconté les exploits américains
dans « Renegade Boxing Club » (Série Noire, Gallimard) était mon
parrain préféré, le patron, le seul, de Moscou à Brighton Beach, ou « Little Odessa ».
LE TRUAND REPENTI FLINGUÉ APRÈS AVOIR
COMMUNIÉ À L’ÉGLISE
(Traduit par TM)
(Traduit par TM)
TIMOKHA
GOMELSKI ABATTU AUX ENVIRONS DE MOSCOU
02-06-2014
Samedi dernier, un des plus anciens leaders
du monde criminel de Russie a été tué aux environs de Moscou : Alexandre
Timochenko (Timokha Gomeslski). D’après la première version des faits, Timokha
serait la dernière victime en date d’une guerre entre clans opposés qui se
poursuit déjà depuis plusieurs années.
Âgé de soixante ans, le caïd
de la pègre est tombé dans une embuscade le 31 mai, vers neuf heures du matin.
Après les prières matinales, il est sorti de l’église de la Mère de Dieu du
village de Zamienskoe et se dirigeait vers sa voiture. C’est le moment qu’a choisi un assassin non
identifié pour s’approcher et lui tirer dans le dos à sept reprises. Alexandre
Timochenko est mort sur place de ses blessures. Le tueur a fui les lieux du
crime sur la moto d’un complice. Tous deux portaient un casque de moto et leurs
visages n’ont pu être identifiés. Au moment même de l’agression on installait
une caméra de surveillance dans le magasin situé en face de l’église.
Comme
le suggèrent les enquêteurs, le lieu d’embuscade d’Alexandre Timochenko n’a pas
été choisi par hasard. Celui-ci menait une vie d’ermite depuis quelques années
derrière une palissade de quatre mètres de haut dans son domicile bien protégé
de Maslo, et ne faisait d’apparitions régulières qu’à l’église du village
voisin. D’après le père Mikhaïl, Alexandre Timochenko venait le vendredi soir
pour se confesser, et le samedi matin pour communier.
Les
policiers ont ouvert une enquête pour infraction à l’article 105 (meurtre) et à
l’article 222 (détention illégale d’armes à feu) du code pénal de la Fédération
Russe. La police examine toutes les variantes possibles concernant ce crime,
mais prioritairement la version selon laquelle l’une des figures les plus anciennes
de la pègre russe aurait été une cible de la guerre entre clans opposés du
milieu, qui se poursuit sans trêve depuis sept ans déjà. Parmi les victimes de
cette guerre, on compte Viatcheslav Ivankov (Iapontchik), Aslan Ouçoian (Tonton
Hassan) et d’autres figures connues du milieu.
La
biographie d’Alexandre Timochenko est inhabituelle pour un « voleur selon
la loi ». Il est né en Biélorussie, rejeton du secrétaire régional du
parti communiste, mais a été condamné pour viol en réunion dans son
adolescence. Son père n’a pu lui épargner une peine de prison, ce crime avait
fait grand bruit à l’époque. Il fut condamné ensuite pour houliganisme,
agression, et cambriolage. C’est dans les lieux de détention qu’il devait se
lier à des figures du milieu et c’est à l’initiative de Viatcheslav Ivankov
qu’il fut admis dans les rangs des « voleurs selon la loi », sous le
surnom de Timokha Gomelski.
Au
début des années 1990, Timokha s’installa en Europe, où, en tant que représentant
de Iapontchik il prit contact avec l’élite de la mafia russe émigrée.
Cependant, en 1998, il fut arrêté par la police allemande, sous l’accusation de
racket, prise d’otage et meurtres — en particulier celui de Efim Laskine (Fima
Jid), alors le leader de la diaspora du milieu russe en Allemagne. Timochenko
fut condamné à 12 ans de réclusion criminelle mais bénéficia d’une libération
anticipée pour bonne conduite en 2006, et retourna en Russie.
D’après
les policiers spécialistes de la lutte contre le crime organisé, Timochenko
s’est longtemps efforcé de rester à l’écart des règlements de comptes. Mais
après la mort de Viatcheslav Ivankov, il devait, contre toute attente, prendre
le parti du clan adverse, dont le chef était Tariel Onian.
En
dehors de ça, Alexandre Timochenko commit encore une erreur, jugée très
sévèrement dans les milieux criminels. Le 29 janvier de l’année en cours, il
fut arrêté par la police à la sortie du restaurant « Solo » sur le
boulevard Riazan. Les policiers menèrent ensuite une conversation
« prophylactique » avec lui dans les locaux du
service de la lutte contre le crime
organisé, où, en échange de la promesse d’être libéré, il renonça à son titre
de truand, déclarant devant les caméras vidéo, qu’il n’était pas un « voleur
selon la loi » et ne l’avait jamais été.
avant de se rendre à l'enterrement de Yaponshik. |
Alexandre Jeglov.