Affichage des articles dont le libellé est L'Icône. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est L'Icône. Afficher tous les articles

6.12.24

La guerre culturelle


 


    Mon très cher ami Mark Ames, avec qui nous avons traversé tant de péripéties à Moscou il y a 25 ans, me raconte que Le Monde a fait une critique élogieuse du navet cinématographique de Serebriakov sur feu notre ami commun Édouard Limonov. Comme je ne lis pas ce torchon, je n’étais pas au courant. Bien avant qu’il ne passe aux mains du pire gauchisme sociétal néo-con, les situationnistes avaient appelé cette feuille de chou « Le journal de tous les pouvoirs ». 
     Comme me l’a rappelé un récent biopic d’immigrants russes pleins aux as sur feu le poète Boris Ryjii où l’on comptait utiliser mon personnage de traducteur pour obtenir une caution européenne et prouver que le poète-voyou d’Ekaterinbourg, nostalgique de l’URSS, se serait opposé à « l’opération spéciale » — la guerre culturelle bobo bat son plein. Si j’ai refusé qu’on se serve de mon nom pour le navet Ryjii, la diaspora antirusse s’est tout de même servie de mon personnage, inventant sans doute un quelconque Henri Sigognac affublé de mes caractéristiques. Si jamais j’ai la preuve du contraire, je les traîne devant la Cour Suprême !… J’avoue regretter ne pas avoir vu le biopic pour savoir qui jouait mon rôle et comment. Ça promettait un certain nombre d’éclats de rire. Un bref moment disponible en location, le film a été très vite interdit de diffusion en Fédération Russe. Ma gloire usurpée sur les écrans aura donc été de très courte durée… 
Boris Ryjii, poète de l'Oural.


    Il semble donc normal que l’organe central des néo-cons sociétaux de Phrance fasse l’éloge d’un film nul, fondé sur le navrant recopiage des écrits d’Édouard Limonov par Carrière d’Encaustique. Ce fils à maman pleurnichard vient de s’embourber un nouveau prix littéraire, paraît-il. Né dedans, il les décroche tous, quand t’en as un, t’en as dix. Ce n’est pas une question de mérite, c’est une question de classe dominante. Peu avant sa mort, Édouard m’écrivait : « Thierry, je sais qu’il a du succès parce que c’est un bourgeois». 
    Désamorcer le « fragment radioactif de radicalité » d’Édouard Limonov, semble un objectif logique du révisionnisme gaucho-néo-con, récrivant l’histoire du soir au matin. Selon mes amis éditeurs, les « critiques » de ces organes de désinformation rapportent bien moins qu’un seul article de blogueur un peu spécialisé, un peu pointu. Tout n’est donc pas perdu. Le navet sur Limonov n’enregistrera sans doute pas plus d’entrées. Peut-être même moins. 
    Thierry Marignac, décembre 2024.

19.12.22

Corruption à l'UE: système de la turpitude

 


        LA BOUSSOLE DU CONFINEMENT

         La clarté du printemps 2020, sous la chape du diktat mondial, était couleur de plomb. Ce furent deux mois de dérive immobile au fil du temps, parenthèse de l’absurde, où chaque entrevue à distance imposée dévoilait chez l’interlocuteur, un navire glissant sur des gouffres amers…  On naviguait sur l’abîme, flux et reflux de cette mort dont on nous rabâchait l’omniprésence, en nous amarrant à l’interdit qui nous bloquait dans notre écluse.

         Si, dans la ville septentrionale où j’avais trouvé refuge hors de Phrance, on circulait à peu près librement, sans ausweis auto-signé, sans masque et sans contredanse, les rues largement désertes et les commerces fermés, le silence, la méfiance des passants, évoquaient comme ailleurs le vaisseau fantôme d’une vie suspendue. Le contraste de cette lenteur spectrale sur des eaux stagnantes avec le bouillonnement de l’hystérie officielle, l’hystérie devenue seule parole permise, reprise par tout un chacun à de rares exceptions près, était d’une violence traumatisante, suscitant le déni à chaque surenchère des braillards. La mort rôdait-elle vraiment, à quelques encablures ? Plus tard, cette purée de pois de mots, de thèses et d’antithèses, d’expertise et d’ignorance, d’injonctions contradictoires, fut dissipée, un matin brutal de fin d’hiver, par les canons de l’armée russe. La mort reprenait son allure habituelle et les masques tombèrent.

          Pourquoi revenir là-dessus ? Parce qu’en ces temps déjà lointains de l’avis de tempête pandémique, réglés par les vents contraires du doute et de l’incertitude, quelques-uns avaient retrouvé, ou peut-être découvert, la boussole du désir, l’appel du grand large.

          À l’heure actuelle, où les furies soufflent à nouveau de toutes parts la folie guerrière sur des océans d’ignorance, il n’est pas inutile de s’en souvenir. Petit changement de cap vers l’œil du cyclone, où les eaux sont plus calmes et la vue plus dégagée.

         C’était une initiative du dessinateur-graphiste Philippe Gerbaud, qui eut le coup de génie de réveiller l’instinct, l’humour du naufragé qu’était chacun d’entre nous au cours de cette escale forcée, arrimé à son port d’attache. Il avait baptisé son entreprise Chronotes du confinement. Certes, nous n’avions plus que la chronologie, le mouvement était passible des fers à fond de cale, les quartiers-maîtres de tous les pouvoirs le vociféraient quotidiennement. Je n’en publierai ci-dessous que quelques-unes, que les autres contributeurs me pardonnent…




         




    Pour ma part, si je contribuais activement au rétablissement de l’immunité naturelle par la fantaisie, la rêverie des Chronotes, j’avais, gardant un brin de santé mentale, trouvé un autre stratagème, une autre Croix du Sud, pour traverser cette pause contrainte sans virer louftingue. Ce fut un roman, publié l’année suivante chez Auda Isarn, intitulé Terminal-Croisière. En partie histoire d’amour malheureuse sur un paquebot, en partie interrogatoire policier au port d’Anvers, ses personnages et notamment l’évanescente beauté qui tournait la tête du héros, traducteur comme votre serviteur, me tenaient compagnie, lors de ce confinement prolongé. J’aurais souhaité m’abstenir de claironner ma clairvoyance, confinant, dirais-je sans modestie aucune, parfois à la double-vue et de confirmer la malédiction du romancier-poète Jérôme Leroy à mon encontre — Tu écris tes bouquins trop tôt — mais il s’agissait d’un scandale de corruption à l’UE, d’une enquête menée par des flics belges, sur fond d’hostilité à la Russie…

         Je n’aurais bien sûr pas imaginé qu’on trouve des sacs de biffetons chez des parlementaires européens, des dirigeants d’ONG, des syndicalistes, et mon intrigue, l’arnaque décrite était plus sophistiquée. Si j’avais évoqué des valises de billets, on m’aurait jugé partisan et grossier. C’est le genre de choses qu’on ne pardonne pas à un romancier… Mais tous ces personnages étaient là. Je les croyais juste plus raffinés dans la combine.

         Quoi qu’il en soit, deux ans et demi plus tard, l’actualité paraît prouver que ma boussole de confinement m’avait bien indiqué le Nord.

         En ces temps difficiles, où il importe de retrouver un chemin vers la paix et l’intégrité, ces rappels à la nécessité de l’ironie et du scepticisme s’imposent.  Si on vire tous tocbombes — nucléaires — ça n’arrangera rien.

         Thierry Marignac, décembre 2022.

3.10.22

Conflit Est-Ouest: la pub du voyou



    Farces et fariboles à la foire aux filous 

    (Thierry Marignac)
    
     Si, d’un doigt désinvolte, j’enclenche le mouvement giratoire du barillet à la roulette russe des offenses, inévitablement une viendra se placer en face de la bouche à feu. Dans L’Adieu à Gonzague, Drieu, qui évoquait Jacques Rigaut, parlait d’offenses-breloques. Mais la métaphore ne tient plus debout. Il faudrait une breloque de calibre 7,65. 

     Dans le tintamarre actuel autour de la guerre d’Ukraine, le plus frappant, c’est la notable quantité d’ignorance pilonnée jour après jour sur un sujet que les bavards ont à peine eu le temps d’étudier, puisqu’hier encore, il n’existait pas pour eux. Au fil du temps, et dans divers organes de presse, j’ai pris plusieurs journalistes en flagrant délit : ils racontaient n’importe quoi. J’ai épinglé dans ces pages, il y a quelques mois, un article de Libération sur les drogues en Ukraine, un sujet sur lequel personne ne peut mettre mes compétences en doute. Au second paragraphe, l’auteur démontrait sa totale méconnaissance de la question puisqu’il donnait à la politique de Réduction des Risques (échange de seringues, etc.) une dizaine d’années d’existence, alors qu’elle était déjà officielle depuis deux ans, quand je suis arrivé à Kiev en décembre 2004 pour commencer mon long reportage sur la toxicomanie dans le pays. J’avais épinglé, il y a plus longtemps, un journaliste du … un grand quotidien français, qui au bout d’un laborieux éditorial, confondait la date de l’indépendance de l’Ukraine (1991) et celle de la Révolution Orange (2004). Si ces détails peuvent sembler véniels, ils prouvent concrètement que l’auteur vous enfume, il est lui-même dans une épaisse purée de pois. Je pourrais multiplier les exemples de ce genre.  En réalité, comme les langues et la culture sont d’un abord difficile, que les « spécialistes » ne foisonnent soudainement que lorsque ça commence à rapporter, le tâcheron moyen d’une rédaction boucle un dossier avec Wikipédia et deux articles parcourus, un de la BBC, l’autre du NYT. D’ailleurs, c’est parfois la secrétaire qui se charge de lui mâcher les infos dans un dossier bâclé. Ce qui ouvre des perspectives. Si c’est le cas dans un dossier que je connais et peux repérer, qu’est-ce que ça doit être, dans ceux que je ne connais pas : je ne sais pas, moi, la bande de Gaza, ou les pirates de Somalie. Il faut s’y faire, c’est l’information en démocratie éclairée. Les complotistes diraient que cette incompétence est voulue, mais je n’en jurerais pas, elle est peut-être inhérente au système, à son économie. Sans doute moins innocente est la tendance des médias à écarter les compétences, fussent-elles élevées, de quiconque est mal vu dans leur sérail. 
     Un ami analyste du renseignement économique me confiait à son tour la distance en années lumière séparant les faits de la version qu’en donnent les organes d’actualité, dans des dossiers qu’il avait traités. 
    

    Dans un récent discours, le président russe faisait remonter à la fin de l’URSS les origines du conflit fratricide en cours. On peut penser ce qu’on veut du personnage et de sa rhétorique — c’est néanmoins indéniable. C’est dans cet indémêlable nœud gordien d’une fin précipitée, que trente ans de conflits dans l’ex-empire ont vu le jour. Il faut beaucoup de travail et d’acharnement, d’études, de connaissances, de voyages et de rencontres pour y comprendre quelque chose, avoir considéré l’affaire sous des angles multiples et pas toujours du même endroit. Formatés pour donner un message calibré, et dans l’ensemble le même sur tout l’éventail disponible, les journalistes n’ont ni le temps, ni l’argent, ni l’envie. Comme le faisait remarquer John Le Carré en 2003, il en est ainsi depuis la fin de la Guerre Froide, où curieux renversement de l’Histoire, l’information occidentale est devenue soviétique, c’est à dire l’information d’un bloc. Il n’est pas toujours inutile d’écouter les romanciers. 

    Pour revenir aux offenses, et ne pas succomber à une rage pourtant justifiée contre les « experts » de toutes obédiences, j’en retiendrai quelques-unes qui me piquent encore, que je porte en breloque. Dans mon histoire littéraire, la Russie, puis l’Ukraine ont marqué un tournant, débuté un cycle. Celui-ci a commencé avec le roman Fuyards, paru en 2003 aux éditions Rivages, écrit après un long séjour en Moscovie, qui au travers d’une histoire policière, évoquait en détail la Russie de Eltsine — ruine, sarabande des hyènes, et orgueil blessé. Poliment ignoré, le monde du polar ne s’intéressait qu’à Los Angeles. La Russie n’existait que dans les caricatures de mafieux des romans de Dantec ou les James Bond. Il se vendit tout de même à peu près. 


    
    Ensuite, plus vexant, ma longue enquête en Ukraine Vint, le roman noir des drogues en Ukraine parue en 2006 aux éditions Payot, fut accueillie par un silence assourdissant si l’on excepte le magazine Géo, la radio RFI et l’ex-ambassadeur de France en Ukraine, Philippe de Suremain, qui m’écrivit une longue lettre. À l’époque, selon le cliché en cours en ce moment, personne ne savait où ça se trouvait. Avant mon départ pour Kiev, tout le monde commettait l’erreur : « Tu pars en Russie ». Sur l’Ukraine et bien souvent sur la Russie, l’ignorance est la règle. Mes amis des Narcotiques Anonymes de Kiev étaient furieux: "Nous, on sait faire la différence entre la France et l'Espagne!…"



    Plus récemment, ce qui prête à rire aujourd’hui, par une de mes sacrées inspirations prématurées, je revins sur la fin de l’URSS dans le roman L’Icône, paru en 2019 aux éditions des Arènes. L’originalité du livre tenait au fait que cette histoire était vue à deux époques différentes : de Paris au travers d'un mouvement de dissidents dans les années 80-90, puis vingt ans plus tard du quartier russe de Brighton Beach, où j’ai parfois invité des amis de passage à déjeuner au bord de la mer quand je fréquentais encore New York. À l’exception d’un article de Sébastien Lapaque pour Le Figaro, la réaction générale était l’incompréhension : Qu’est-ce que tu t’intéresse encore à cette vieille histoire ?… Incidemment, la seule séquence ne se déroulant pas en Occident se passait en Ukraine — une vilaine affaire de spéculation immobilière où s’affrontaient Anglais et autochtones au moment où le monde basculait — la victoire définitive de la marchandise pure. À l’heure actuelle, sujet devenu brûlant, les « experts » surgis comme des champignons après la pluie, nous refont le film sans en avoir suivi les épisodes, ou bien avec un ordre du jour partisan. Aucune réflexion sérieuse et de longue haleine, informée. Seuls, temps et concentration appliqués à l’étude d’une histoire aussi complexe imposent une forme d’objectivité au regard. 
    Tu écris tes bouquins trop tôt, m'a dit un jour le romancier et poète Jérôme Leroy avec humour et à-propos. 

    Mais : 
    Ce domaine, plat et froid, inculte et sec, celui des choses possibles, ne m’a jamais tenté comme but de promenade
    Philippe Soupault, Les dernières Nuits de Paris.

4.6.22

Stratégie de la terre brûlée

 

Fumée moscovite

Lourde tête de Français

Manger les chevaux, ou mourir tout à fait

Tu es venu, tu as vu Moscou brûlait

Et en elle ta victoire brûlait.

Quand tu seras de plus solitaire et vieux

Tu te plaindras des vagues enflammées bleues:

—Car ça a crâmé jusqu'au bout… Un tel incendie!…

Dans quel but ça brûlait — on hésitait.

Est-ce qu'on aurait osé brûler Paris —

Nos tours, nos parcs, nos maisons, nos palais ?

Réponds la vague — pourquoi tu te tais?

Je ne suis pas faible d'esprit — mais ça défie mon esprit…

Et les Européens jusqu'à maintenant,

À nouveau les fumées moscovites respirant

Plissent le front…

Certes et comment est-ce qu'il saisiront,

Pourquoi nous brûlons, dans quel but nous brûlons

Boris Ryjii, 1996.

 

Московский дым

Тяжела французская голова:
помирать совсем или есть коней?
...Ты пришёл, увидел – горит Москва,
и твоя победа сгорает в ней.

Будешь ты ещё одинок и стар
и пожалуешься голубым волнам:
- Ведь дотла сгорела...Каков пожар!..
А зачем горела – не ясно нам.

Разве б мы посмели спалить Париж-
наши башни, парки, дворцы, дома?
Отвечай, волна,- почему молчишь?
Хоть не слаб умом – не достать ума...-

И до сей поры европейский люд,
что опять вдыхает московский дым,
напрягает лбы...
Да и как поймут,
почему горим, для чего горим?

1996

 


--

27.5.22

Le secret des machines


 

(traduit du russe par Thierry Marignac)

Vas-y, crépite, ma petite machine,

Débite, la vieille, n’importe quelle absurdité,

Sans hésitation, sur notre passé

Sans mettre en veilleuse ta parole en turbine.

 

Vas-y crépite, mon amie,

Tu as probablement cent ans,

Tu es passé par les mains de qui,

De quel bureau étais-tu l’ornement ?

 

Marchand, enquêteur, ou Tchékiste ?

En effet c’est même une très bonne piste,

Tout n’est pas propre ou pur en toi

Et tes horribles taches rien ne lavera.

 

Tandis que les lettres crépitaient,

Que le chariot somnolent défilait,

Dans le sous-sol à moitié désert

On achevait une sombre affaire.

 

L’ombre au mur, plus noire que la suie

S’est à nouveau tassée après avoir grandi

Sans même chercher à enjamber

Une flaque de sang coagulé.

 

Et l’escalier de marbre gravissait

Sous mille watts de lumière

La secrétaire qui pleurait,

En croquant du chocolat amer.

Boris Rijy, 1998 .

 

Рыжий Борис (1974 - 2001) 

* * *

Давай, стучи, моя машинка,
неси, старуха, всякий вздор,
о нашем прошлом без запинки
не умокая тараторь.

Колись давай, моя подруга,
тебе, пожалуй, сотня лет,
прошла через какие руки,
чей украшала кабинет?

Торговца, сыщика, чекиста?
Ведь очень даже может быть,
отнюдь не все с тобою чисто
и страшных пятен не отмыть.

Покуда литеры стучали,
каретка сонная плыла,
в полупустом полуподвале
вершились темные дела.

Тень на стене чернее сажи
росла и уменьшалась вновь,
не перешагивая даже
через запекшуюся кровь.

И шла по мраморному маршу
под освещеньем в тыщу ватт
заплаканная секретарша,
ломая горький шоколад.

1998

 

 

 

11.9.21

Terminal-croisière: critiques et recensions du dernier roman de TM.



            Embarquement et commandes au lien suivant (ou en librairie,) Auda Isarn, 12 €, 167 pages et des broquilles:

                https://amzn.to/3DKuqyf



Chers lecteurs d’Antifixion,

Ces pages étant destinées, au moins en théorie — outre l'organisation clandestine d’une secte conspirative d’amateurs de poésie russe — à faire la promotion des œuvres de leurs auteurs (en l’occurrence surtout de l’un d’eux : Thierry Marignac. Vincent Deyveaux est toujours vivant, je vous rassure, mais il ne fout rien !… Un recueil de poésie toutes les années bissextiles, et à quoi notre poète maison est-il occupé le reste du temps ?… La Direction des Ressources Humaines compte le convoquer prochainement à ce sujet…), nous aurons l’outrecuidance de vous faire un recueil des plus évocatrices citations des critiques qui ont bien voulu lire mon dernier roman : Terminal-Croisière, chez Auda Isarn. Elles sont illustrées par Placid (https://toutplacid.tumblr.com/), un ami depuis la Révocation de l’Édit de Nantes !…



 

Depuis quelques années déjà, je l’exhortais à utiliser sa connaissance de la capitale de l’Union européenne dans un roman. C’est chose faite, et de façon plus qu’originale, puisque l’intrigue ne se passe ni aux alentours du Parlement ou de la Commission, ni dans ces pubs irlandais ou ces trattorias de luxe où surnagent chargés de communication et trafiquants d’influence, attachés parlementaires et barbouzes – « cette ambiance de sac et de corde ».

    Non, Thierry Marignac nous décrit ce petit monde aussi corrompu que condescendant de façon indirecte, sur un paquebot de luxe et dans des containers de la police des douanes.

Christopher Gérard


Tout tient la route dans la vitesse haletante et la suspension du temps à laquelle se confronte le narrateur, l’auteur et le lecteur découvrant ce livre à couverture de carte postale (au prix d’un livre de poche) en plein milieu de l’été 2021, une « fixion » dont l’action se déroule avant la grande peste comme si le temps avait fait un saut vertigineux, irrémédiable, en nous retranchant de notre propre passé  - autre troublant paradoxe de TC.

Daniel Mallerin




 

            Un roman gris, comme les yeux de Svetlana, comme son pull en cachemire, comme le ciel de pluie, comme le costume des eurocrates... Tant de gris. Le gris serait-il une couleur ? Oui, une couleur multiple, changeante, aux nuances et aux reflets infinis, à l'éclat tour à tour tranchant et sensuel. Si le gris est tout cela, alors Terminal Croisière est à son image.

Velda, le blogdupolar

 

 

     Le jeune policier belge chargé de l’enquête se montre très pugnace, mais saura-t-il dénouer l'affaire à tiroirs qui se présente devant lui ? Thomas Dessaignes restera-t-il amoureusement transi devant le charme slave ? Pour le savoir, il vous faudra lire le dernier roman de Thierry Marignac qui ajoute ici une nouvelle pépite à son œuvre.

Johan Hardoy



 

Roman d’atmosphère maritime (on pense, justement, à À quai), narration subtile qui se joue des temporalités – temps du récit et temps de l’intrigue –, style précis aux métaphores raffinées, on retrouve là toute l’élégante manière de Thierry Marignac.

Arnaud Bordes

 

 

Le traducteur-narrateur est un nouveau personnage dans l’univers du roman policier. Je ne lui connais pas de précédent. Mais dans un monde où la criminalité s’internationalise… Ce type de héros est promis à un grand avenir !

Francis Bergeron

 

Suite logique de L'Icône - narration alternée, histoire d'amour tragique, poésie sensible et visuelle -, Terminal-Croisière mêle tous les thèmes et les obsessions chers à l’auteur avec une habileté et un charme fou.

Benjamin de Surmont




    Une exégèse venue de Russie
Le Rosaire de la fortune 

Notes sur Marignac

 

         J’aurais dû les écrire il y a longtemps, quand j’ai lu le roman. Quand je suis tombée sous son charme, sans comprendre encore les lois présidant à sa création.

 

         Terminal-Croisière peut se traduire en russe de diverses manières. Le terme Terminal des vaisseaux de lignes de croisière est entré dans la nouvelle langue russe post-soviétique.

         Mais il y a encore un élément de férocité, venu de Terminator.

 

         Ainsi, le nouveau roman de Thierry Marignac — auteur aux multiples incarnations — serait classé aujourd’hui comme un journal de voyage, une histoire d’amour avec des éléments de romans policier et comme un roman d’aventures. Et aussi comme intellectuel philologique : parmi les héros apparaît l’ombre non du père d'Hamlet, mais l’ombre du parrain de Pouchkine, le poète Gavril Derjavine bénissant son talent juvénile. TC n’est pas un roman en 3D (très populaire de nos jours). Mais en 4D. Tous ces aspects créent un certain équilibre, des facettes subtiles qui retiennent l’attention du lecteur. D’autre part ces aspects sont les facettes du cristal magique à travers lequel Pouchkine, apercevait l’horizon du roman libre.



 

A.  C. Pouchkine

Evguéni Onéguine

 

Chapitre VIII

 

                  Strophe L

Excuse-moi, mon compagnon inhabituel

Et toi, mon idéal fidèle,

Et toi, mon vivant et permanent

Quoique petit labeur. J’ai su avec vous

Tout ce qui est enviable pour le poète :

L’oubli de la vie et du monde les tempêtes,

La conversation avec des amis doux.

Tant et tant de jours j’ai traversé

Depuis, que Tatiana juvénile

Et avec elle Onéguine dans un rêve indéfini

Me sont apparus en premier —

Et l’horizon d’une romance en liberté

Je n’ai pas à travers un cristal enchanté,

Encore clairement distingué.

(Traduction © TM)

 

Mais Pouchkine et Marignac n’ont pas les mêmes cristaux de clairvoyance : chez le premier il s’agit d’un attribut magique, chez le second une production créative.



 

Le style de Thierry est celui d’une écriture sonore, elle est construite sur une harmonie intérieure, invisible, mais qu’on capte à l’oreille ; ainsi une symphonie ou un morceau d’orgue appelle des images en masse, des instantanés de visions sur l’écran azuré de l’atmosphère ; elle lui donne un volume holographique et lui fournit un espace pour différents effets sonores : les échos pour celui qui survole les labyrinthes, le clapotis des vagues à bord du vaisseau, les voix, les murmures, les cris.

 

Marignac est un compositeur de prose, il s’agit d’une partition littéraire, il faut la traduire comme un livret d’opéra : " à rythme égal" ou, pour parler plus justement, en mesure ou en assonance avec l’original. Sinon l’œuvre ne résonnera pas correctement dans la langue de la traduction. Et tant qu’une telle parenté n’apparaîtra pas chez un traducteur ou une traductrice, on pourra dire que sa prose est intraduisible. C’est-à-dire qu’il ne s’agirait dans ce cas-là  que d’un brouillon, et non d’une œuvre d’art, comme il conviendrait. J’ai découvert le romancier Marignac, en lisant ses œuvres en français.

Margarita Sosnitskaïa, Belle de lettres.

(Traduit par TM)



 

Заметки о Мариньяке

 

Давно надо было их начать записывать, еще когда читала роман. Когда попала под его гипноз, но еще не поняла, по каким законам он создается.

 

«Терминал Круазье» - можно перевести по-разному, там, если опираться на морфологию, несколько смыслов: это и Конечный круиз, и Порт круизов, и Гавань круизов, и еще Терминал круизных лайнеров, т.к. это слово вошло в постсоветский российский новояз. Но есть еще и что-то зловещее от Терминатора.

Итак, данный роман многоликого Тьерри Мариньяка -  сегодня классифицируется как травелог, любовная история с элементами детектива и как приключенческий роман. А еще интеллектуально-филологический: среди героев появляется не тень отца Гамлета, а тень крестного отца Пушкина, благословившего его молодое дарование, - поэта Гавриила Державина. «Терминал круизных лайнеров» - это роман даже не в формате 3D (очень  популярном сегодня), a 4 D. Все эти аспекты создают некое равновесие, тонкую грань, на которой держится внимание читателя. С другой стороны эти аспекты -являются гранями того магического кристалла, сквозь который Пушкин прозревал даль свободного романа.

 



А. С. Пушкин
Роман в стихах
Евгений Онегин

Глава VIII

Строфа L

Прости ж и ты, мой спутник странный,1
И ты, мой верный идеал,2
И ты, живой и постоянный,
Хоть малый труд. Я с вами знал
Все, что завидно для поэта:
Забвенье жизни в бурях света,
Беседу сладкую друзей.
Промчалось много, много дней
С тех пор, как юная Татьяна
И с ней Онегин в смутном сне
Явилися впервые мне —
И даль свободного романа
Я сквозь магический кристалл3
Еще не ясно различал.)

 

 

Но у Пушкина и Мариньяка это разные кристаллы: у первого это атрибут магии, у второго –  произведение его творчества.

 

Стиль Тьерри – это зукопись, она построена на внутренней гармонии, которая невидима, но улавливаема слухом; так симфония или игра на органе вызывает массу образов, картин видений на эфирном экране воздуха; она делает текст объемным, как голограмма и предоставляет ему пространство для разных звуковых эффектов: эха, летящему по лабиринтам, плеска волны о борт судна, голосов, шепотов, крика.

Мариньяк – он композитор прозы, это литературная партитура, переводить ее надо, как оперное либретто: экворитмично или, говоря по-русски, соразмерно и созвучно оригиналу. Иначе произведение не зазвучит на языке перевода. И пока не появится такой конгениальный переводчик/переводчица, его прозу можно назвать непереводимой. Т.е. это будет уровень подстрочника, а не произведения искусства. Я открыла писателя Мариньяка, прочитав его вещь по-французски.

                                                                      Маргарита Сосницкая, Belle de lettres