28.11.21

Libre circulation des virus et des biens

 

Lac de Côme à la nuit tombante

"La peur de penser en dehors des consignes a fait de la liberté une prison (…)"

 

"La Big Medicine — la technocratie médicale — nous doit des comptes car elle écrase le pathétique et s'empare de l'homme pour expérimenter un monde qui ne serait plus confronté à l'Abîme, un monde délivré de la pensée, mais Gouverné par les violents (…)"

La Fabrique de l'homme occidental, Pierre Legendre.

 

(Vers traduits du russe par Thierry Marignac)

 

            Lorsque, au soir crépusculaire

            Expire un ciel atrabilaire

            Et sur la marche de l'autel

            Jette un dernier rayon vermeil

 

            Devant lui s'incline, esseulée

            Seule, désireuse de chanter

            Une épouse attristée,

            Une fille trompée.

 

            Qui connaît les ténèbres de l'âme des gens,

            Leur mélancolie, leur ravissement?

            C'est un émail bleu

            Fermé à nos yeux.

 

            Qui nous expliquera pourquoi

            Chez cette épouse, toujours pleine de mélancolie,

            Les yeux sont à demi assombris

            Recouverts pourtant d'un lointain éclat?

 

            Dans quel but sur ce front élevé

            Les rides du doute ont tremblé

            Et entre les sourcils se sont déposés, pesants,

            Des siècles d'épuisement.

 

            Et les lèvres souriantes

            Dans quel but énigmatiques et tremblantes?

            Et exigent un rêve passionnément,

            Pour que de sourires, il ne s'agisse pas  seulement?

 

            Dans quel but en elle tant de charme sans bruit?

            Pourquoi dans ses yeux des feux d'incendie?

            Elle est pour nous un maladif cauchemar

            Ou bien, c'est vrai, un amer cauchemar.

 

            Pourquoi dans un rêve désespéré

            Sur la marche de l'autel s'est-elle inclinée?

            Que lui faut-il des hautes sphères

            Des ombres blanches de l'atmosphère?

 

            On ne sait pas! Les ténèbres nocturnes, profondément,

            Le rêve — l'incendie, l'instant — les gémissements

            Lorsqu'on voit poindre à l'Orient,

            Les rayons d'une vie se renouvelant?

            Nikolaï Goumiliev



           

Когда ж вечерняя заря

На темном небе угасает

И на ступени алтаря

Последний алый луч бросает

Пред ним склоняется одна,

 

Однажелавшая напева

Или печальная жена,

Или обманутая дева.

 Кто знает мрак души людской,

 

 Ее восторги и печали?

Они эмалью голубой

От нас закрытые скрижали

Кто объяснит нампочему

 

У той жены всегда печальной

Глаза являют полутьму,

Хотя и кроют отблеск дальний?

  Зачем высокое чело

 

Дрожит морщинами сомненья,

И меж бровями залегло

 Веков тяжелое томленье

И улыбаются уста

 

Зачем загадочно и зыбко?

И страстно требует мечта,

 Чтоб этой не было улыбки

Зачем в ней столько тихих чар?

 

Зачем в очах огонь пожара?

Она для нас больной кошмар,

Иль правдагорестней кошмара

Зачемв отчаяньи мечты,

 

Она склонилась на ступени?

Что надо ей от высоты

И от воздушно-белой тени

 

Не знаемМрак ночной глубок,

Мечта – пожармгновенья – стоны;

Когда ж забрезжится восток

 Лучами жизни обновленной?

Николай Гумилев


19.11.21

Poétesse russe contemporaine

La Reine ANNE


La poésie d’Anna Arkatova, d’une facture extrêmement contemporaine, présente ses difficultés particulières au traducteur et, je requiers l’indulgence du jury, il ne s’agit ci-dessous que de mes premières tentatives de « chevaucher le tigre » comme disait le sulfureux Julius Evola — que je ne cite ici que parce que la métaphore est adéquate, sans compter que tirer la bourre à la politcorrectitude de temps en temps est un loisir de gentleman, comme disait Édouard Limonov, lui-même mal vu chez la valetaille dominante.

La poétesse A.A. possède ses qualités propres de « poésie objective », dues à son souci forcené d’éviter tout pathos. Le cliché a chez elle une fonction rythmique-métrique dont elle a un sens remarquable, quasi « dadaïste ». Elle n’était pas tout à fait d’accord avec cette analyse, de même que si de mon point de vue les vers ci-dessous évoquaient la mort, elle s’insurgeait !… Il s’agissait selon elle des souffrances de la vie…

(Vers traduits du russe par Thierry Marignac ©)

 

Les vaisseaux dans la tourmente ont péri

Il est dangereux de suivre la voie stellaire

Le tablier blanc de l’uniforme scolaire

N’a nullement été sali

 

Tout sans retour s’est abîmé

A la guerre comme à la guerre

Deux manchettes proprement enserrent

 Sur moi tendrement vont briller

 

La prise par terre étincelle

Les décharges se concentrent au ciel

Sous la bride, le chariot court à fond

Le vieux et son navet planter dans le sillon

 

L’apparence extérieure et la discipline

Depuis la nuit, le porte-document rempli

Un dur matelas de plumes est la vie

La mort un lit d’une douceur divine

 

**

корабли погибли в шторме

за звездой опасен путь

белый фартук в школьной форме

не испачкался ничуть

 

все пропало без возврата

на войне как на войне

два манжета аккуратных

нежно светятся на мне

 

на полу искрит розетка

в небе копится разряд

под рукой бежит каретка

дедку с  репкой ставит в ряд

 

внешний вид и дисциплина

с ночи собранный портфель

жизни жесткая перина

смерти мягкая постель




 

Élégie intime en s’endormant

C’est pour toujours souviens t’en,

Transmets au cercle de tes descendants,

Que c’est l’audace qui conquiert les cités,

Que plus jamais tu ne seras

Ni bruyante ni émaciée.

Manger des biscuits et du levain, tu pourras

Ils entreront en toi, comme tout ce qui est vivant,

Et recouvriront exactement

Tout ce que comme femme égérie

Tu as appris.

Mais plus loin de l’isolation thermique les thèmes

Mais plus loin de l’isolation sonore les thèmes

Poursuivre l’itinéraire plus jamais tu ne pourras

Tant que tu es ici-bas ton cauchemar durcira

Devant l’extrémité privée et le commun tranchant

Et l’intérieur réchauffement.

 

Je veux devant le miroir demander

Comment on peut simplement se dresser

Ni reflétant, ni exprimant

Demander simplement.

Après je veux parcourir, comme une thérapie,

Les soudains rapides caressants,

Là où je me dresse encore amincie,

Avec moi-même, guerroyant, bataillant.

Anna Arkatova.

 

Интимная элегия на отход ко сну

 

Запомни это раз и навсегда,

по кругу передай своим потомкам,

что смелость покоряет города,

а ты уже не будешь никогда

худой и звонкой.

Ты можешь есть бисквит и дрожжевое,

они войдут в тебя как все живое

и лягут аккуратным одеялом

на все что ты как женщина

узнала.

Но дальше темы теплоизоляций,

но дальше темы звукопоглощений

тебе уже не проложить маршрут -

пока ты тут твой ужас будет крут

пред общим острием и частным краем

и внутренне подогреваем.

 

Хочу у зеркала спросить,

как можно просто так висеть -

не отражаясь не выражаясь

просто спросить.

Потом хочу пройтись как терапия,

скоропостижным ласковым рапидом,

туда где я стою еще стройна

сама с собою битва и война.

Анна Аркатова.