20.11.11

Librairie Itinéraires, 26/11/2011


La LIBRAIRIE ITINERAIRES
                                           vous invite 
(60 rue St-Honoré, Paris 75001)
                        SAMEDI  26  NOVEMBRE   dès  16 h

                 à passer une après-midi insolite en compagnie de


                      


THIERRY  MARIGNAC
écrivain,  traducteur,
qui dédicacera  son nouveau roman « milieu hostile »
Editions BALEINE
      





Même si Thierry a passé une grande part de sa vie hors de  France et que ses romans sont consacrés aux  gens d’autres pays, les voyages où il amène ses lecteurs passent loin de la recherche du « typique » et les expatriés qui peuplent ses romans ne sont pas ceux que l’on croise aux soirées de l’ambassadeur.            .  Partout où le conduisent ses missions et son destin Thierry veut découvrir le dessous de la vie. Comme un chirurgien passe avec son scalpel pour trouver la racine de  maladie, Marignac perce le corps des sociétés pour mieux comprendre les paradoxes du monde.  
     
Avec son nouveau roman n’attendez pas que Thierry Marignac vienne vous caresser dans le sens du poil; l’Ukraine où il vous emmène n’est pas celle des coupoles d’or de Kiev ni des danses villageoises…les héros sont bien fatigués. Au service d’ONG, ils rament dans les méandres des  programmes d’assistance de l’Union Européenne qui se transforment en armes de corruption massive aux mains de laboratoires pharmaceutiques avides.
 «  De Sébastopol, il voyait la tête de cet enfoiré, petit, râblé, ricaneur, prolo monté en grade, souffrant comme une bête d’avoir échoué dans son poste de médiocre, ni à l’Est ni à l’Ouest…. »

Dans une interview Thierry a dit : « Je ne suis ni optimiste, ni pessimiste, juste sceptique. »  Mais il ne serait pas juste de finir le portrait de Marignac sur ce ton mineur; n’oublions pas que Thierry a traduit des dizaines de livres d’auteurs russes et américains. Et son engouement pour la poésie cache probablement une autre partie de sa personnalité qu’il dissimule soigneusement.  

Venez donc à la rencontre de cet auteur énigmatique samedi 26 novembre !
  
                         

16.11.11

Le Bloc de Jérôme Leroy


JÉRÔME LEROY DÉBLOQUE À LA SÉRIE NOIRE (J'VAIS T'EN REFILER!)
Le grand jour, que je reculais quotidiennement depuis quelques semaines, est arrivé : chroniquer le livre de Jérôme portant sur l’extrême-droite, à la SN. Plusieurs raisons à ma valse-hésitation, mais j’avancerai tout d’abord celle qui figure pour moi en haut de la liste : il n’est un secret pour personne que mon Fasciste, paru en 1988, m’a valu une casserole que j’entends résonner aujourd’hui encore à mes basques. Mon refus de me justifier à l’époque, moi qui n’ai jamais milité nulle part, en était la raison essentielle. Que la provo reste une provo. Mon éditeur, Olivier Cohen, fasciné au premier abord par le bouquin, avait suggéré de l’intituler Le Fasciste ou Un Fasciste, pour s’en distancier. Pas question, avais-je répondu avec l’arrogance de la jeunesse. Par la suite avec sa clique, il devait saboter le bouquin, qui ne se vendit correctement qu’en poche, chez Pocket. En effet, son accès média, constitué de la gauche qu’on n’appelait pas encore caviar, en dépendait. Les éditeurs font souvent preuve de ce genre de panique. J’ai connu ça plus tard avec Guérif (Rivages/Noir), et avec Masson (SN), lorsque j’ai osé défier la chapelle manchetto-ellroyenne du polar, celle, constituée de médiocres, qui a besoin d’une doctrine pour écrire, ceci expliquant cela.  Donc, il s’agit d’un souvenir mi-figue, mi-raisin. Pas travaillé pendant deux ans, ensuite. Crevé la dalle. Bon, j’en suis fier évidemment, mais surtout a posteriori— Un léopard meurt avec ses taches  comme dit Jérôme Leroy, sale type qui a réponse à tout. L’affaire restait un hématome, tout de même, dans ma mémoire.

LA NUIT DES LONGS COUTEAUX
Jérôme Leroy a repris dans Le Bloc l’équation de l’échec du romantisme en politique et des purges qui s’ensuivent, qui était le thème de Fasciste, et dont il me devait me dire, il y a quelques semaines : Oui, Thierry, La Nuit des Longs Couteaux, quel autre sujet ? Prouvant par là sa finesse, et notre communauté de vues spontanée. Pourtant Leroy est communiste et militant,  il pense que sa prose porte une partie de l’horrible travail à infliger au Vieux Monde, et Dieu sait que j’objecte. Pour le romancier, les idées sont matériaux de rêve et non outils pour l’action, si « engagé » qu’il se déclare. J’en veux pour témoin mon ami Limonov manœuvré à tous les carrefours par les briscards de la politique, et si on peut lui pardonner Douguine, génie théoricien parlant neuf langues, comment lui pardonner Jirinovski, médiocre bureaucrate mûri sous les soviets, histrion de seconde zone ? Le seul succès de Limonov — mais il était de taille —  ami qui me valut lui aussi tant d’inimitiés, c’était d’avoir réussi, dans le cauchemar des années Yeltsine, à constituer quasiment le seul pôle contre-culturel dans son pays de troubles et d’ignorance. Mais c’est encore un succès d’écrivain, fût-il politique au énième degré.
Amis depuis deux décennies, nous partageons, Jérôme Leroy et moi, loin d’être toujours d’accord, cette histoire déchirée des lettres, du continent d’abondance en perdition où nous vivons — régulièrement brouillés, puisque c’est un militant, et personnellement, je suis un engagé de l’anti-engagement.


CADRE-COMMANDO
Il devait, avec Le Bloc dédoubler en deux personnages le concentré de violence et de rêverie que j’avais placé pour Fasciste entièrement chez le bourgeois perdu Rémi Fontevrault —  réminiscence inconsciente de Genet, le Journal du voleur : …De toutes les centrales de France, Fontevrault, je crois, est la plus troublante. Il reprenait l’Histoire où je l’avais laissée : la désindustrialisation qui nous donne le lumpen du Nord de la France bientôt rouage essentiel, cadre commando,  Et le tour tordu qu’ont pris tous les rêves du monde sans issue de lavie.com  nous donne l’intellectuel revenu de l’engagement (Jérôme !… Tu ne recules devant rien, tu devrais avoir honte !…), Pygmalion du bas du front nordiste dont il a fait un soldat d’élite— avant de le  vendre finalement pour la femme leader du parti, un trait de l’intrigue où je vois pas mal de ruse de la part de l’auteur en quête d’une histoire à la hauteur de son originalité. Pour des raisons de goût et d’esthétique, je n’aime pas beaucoup le : Je suis devenu fasciste pour un sexe de fille. J’admets toutefois, que c’est une première phrase spectaculaire, ce qui a sa valeur en soi,  que l’âge m’a peut-être rendu puritain, ce qui est inquiétant, et contrairement à ce que j’ai lu jusqu’ici, j’y vois une vraisemblance. On a reproché à cette phrase de ne pas être crédible puisqu’une femme leader politique a autre chose à faire. Eh bien, au-delà de DSK — grand-bourgeois partouzard tout à fait classique qu’on aurait absous de ses péchés comme on exonère tout un chacun dans ces univers politiques de faux-semblants, s’il n’avait été un enjeu vital au FMI— je ne vois pas pourquoi les femmes n’auraient pas elles aussi une fringale sexuelle décuplée par l’ambition. Je ne vois pas pourquoi un rêveur congénital comme l’intellectuel qui lui sert de mari ne serait pas fasciné lui aussi, par rebond, par ce vertige de pouvoir. Au contraire, je pense que c’est une habileté supérieure de raconteur d’histoire chez Leroy qui met en place un mécanisme aussi subtil — et menant à la trahison  d’un ami homosexuel. Mais tout est déjà depuis longtemps délavé des fantasmagories grandioses de leurs débuts sur le théâtre du monde, et de l’extrême-droite. C’est le monde d’après.

SANS MERCI
Je note également que c’est un des meilleurs romans de Leroy, ne serait-ce que pour une simple raison : cette regrettable manie de la référence, il s’en sert ici de main de maître, elle est un élément de l’histoire qui a droit de cité. Dieu sait que je l’ai critiqué pour ces références constantes qui détournaient le lecteur de l’affaire en cours. C’est Jack Vance, auteur du genre de SF des années 1970 dont Leroy se réclame, qui ne voulait jamais qu’on le représente ou qu’on parle de lui, en se justifiant en ces termes : C’est déjà assez dur comme ça de faire avaler à un lecteur l’univers que vous lui proposez, sans s’interposer entre son imagination et votre roman. Parole d’Évangile, selon moi. Mais ce roublard de Leroy et sa culture littéraire de droite ont réussi à servir son dessein cette fois avec une justesse confondante.
Je remarquerai encore, que saisi par le livre — à mon corps défendant — je l’ai lu en une seule nuit, en raison d’une certaine qualité d’âpreté sans merci que Leroy avait rarement concentré avec tant de violence et d’efficacité dans ses livres « communistes », mais c’est surtout pour lui tirer la bourre.
(Le Bloc, Jérôme Leroy, Série Noire, Gallimard, vous verrez bien le prix vous-mêmes).
THIERRY MARIGNAC, NOVEMBRE 2011.

8.11.11

Bel hommage d'un ami rocker à Milieu Hostile

Mon ami L'Unwalker rend hommage à Milieu Hostile. Sans prendre de gants, sans médiator, les doigts sanglants, comme un riff bien crasseux.

7.11.11

À QUESTIONS ABSURDES, RÉPONSES LOUFOQUES

L'ami Claude Le Nocher est un des rares chroniqueurs de polar — race conformiste d'abrutissement et d'obédience puritaine manchetto-ellroyenne  de gauche— à avoir de l'humour. Nous ne savons résister au plaisir de reproduire son interview tordue, publiée aujourd'hui 7/11/2011, et cerise sur le gâteau, sous une critique du superbe classique de la came Drugstore Cow-Boy, réédition avec la photo en couverture du vieux Burroughs pape de la défonce, et de Matt Dillon, tirée du film — une séquence au centre de désinto, où on a surnommé Burroughs ÷ "The Priest".
Nous ne saurions trop recommander la lecture du blog de Le Nocher,http://action-suspense.over-blog.com/, à la fois modeste humoristique et sérieux.


Nos z’amis z’auteurs de polars ont accepté de répondre à l’interview express 2011 d’Action-Suspense, une nouvelle série dans l’esprit des Portraits Chinois. Ils nous donnent chacun leur version, amusée ou sérieuse, aux six questions décalées qui leur sont posées.
Aujourd’hui : Thierry Marignac
 
L’ambiance de vos romans, c’est plutôt : Soleil bruineux sur jungle urbaine, ou Grisaille radieuse sur cambrousse pittoresque ?
Si mes décors sont rarement bucoliques — j’ai plutôt la main noire, mes critiques diront la main lourde voire la main au panier, que la main verte — la météo, c’est, semblable aux femmes, ces chères créatures parfumées, ce qui ou qu’on change. On ne niera pas ici les mérites immédiatement glaciaires du ciel lourd béton froid, mais le contre-emploi a ses avantages, et j’ai préféré pour mon petit dernier "Milieu hostile" (éditions Baleine), situé en Ukraine, dépeindre la Glaçonnie l’été, suffocante, écrasée de soleil.
Vos héros sont plutôt : Beaujolais de comptoir, ou Double whisky sec ?
On touche là à une affaire de la plus extrême importance. Et pas si facile qu’une première approche purement micro-comptoir ne pourrait le laisser supposer. Le prisme franco-américaniste défini dans les termes ne me convient pas bien. Pour des raisons de goût et d’esthétique, je ne touche pas au vin rouge, difficile donc d’en parler. Je suis beaucoup plus cultivé sur le Scotch, et lâchez-moi avec vos tourbes fumées à vous emporter le bec, ou plutôt buvez donc votre réglisse infâme en vous croyant raffiné, tandis que dans les Midlands on fabrique du rond, de l’enthousiaste révélateur de céréales.
Mais depuis quatre romans je suis à l’Est en général sur un tord-boyau tantôt incolore tantôt caramel trouble, certes lui aussi vaguement fondé sur du grain dans le meilleur des cas, mais plus apprécié pour la brûlure sur les papilles que pour ses notes boisées de banane et fruits rouges… Donc pas de double whisky non plus.
La véritable maîtrise viendra lorsque je saurai expliquer en mots pourquoi une Duvel est une classique indémodable et possible en journée, tandis qu’une Westmalle triple est un démoniaque breuvage de sorcières dont les origines remontent certainement à la grotte de MacBeth, et quel romantisme déplacé me permet d’aimer la Baltika n°9, bière d’alcoolique pur et de junkies à laquelle on rajoute de l’alcool pour la faire grimper en tonnage — à peine plus raffinée qu’une 8,6 de fumeur de crack.
Vos héros sont du genre : J’aime personne, ou Je me déteste ?
Je me déteste peut-être mais je ne vous aime certainement pas assez pour vous le dire. Dans la mesure où, comme on dit en série noire, J’ai pas de frangin, c’est pas non plus vos oignons, vous cherchez les pépins.



Vos intrigues, c’est : J’ai tout inventé, ou Y a sûrement du vrai ?
Ce questionnaire franchit les limites du tolérable !… À une époque où l’information toute entière est une entreprise de décervelage du client, fondée sur des sommaires techniques de mensonge mis en scène, qu’on ne reprochera jamais assez à l’obscénité télévisuelle, la fiction a le devoir d’éclairer la réalité du planétaire complot poudre aux yeux. N’importe éclat de vérité, fût-il infime, campé avec audace dans les ambiguïtés et paradoxes du temps présent illumine le théâtre du monde — inoubliable lueur du rêve interdit…
Vos intrigues sont : Des torrents imprévisibles, ou Des fleuves canalisés?
Tout est prévu de A à Z dans l’imperturbable logique bulldozer de l’époque contemporaine, calculé au millimètre selon une architecture à la conception inouïe, tant sur le macrocosme que sur l’infinitésimal, un plan informé par les découvertes les plus récentes, alimenté à flux tendus grâce à un système de communication en-ligne susceptible d’orienter l’intrigue dans ses moindres détails au fur et à mesure de l’évolution darwinienne du Schmilblik selon les lois du cosmos et des courbes libidinales de l’auteur — tout de même vieillissant, susceptible d’avoir recours aux stimulants chimiques qui suppléent à l’impuissance, et qui — eussent-ils été mis au point il y a cinq siècles — nous auraient privés de nombreux chef-d’œuvres de l’art classique. Mais cela ne nous regarde pas.
Quel est votre propre état d’esprit : C’était mieux demain, ou Le futur c’est maintenant ?
La régression — en anglais Reverse Flash-Back — vers le gâtisme émerveillé, et légèrement aborigène gogol devant un bout de miroir ou une ampoule qui clignote, un bolide arrivé avant de partir, une télécommande qui couine, un téléphone portable contraceptif et j’en passe, quoique symptôme du gâtisme contemporain généralisé — en français moderne Alzheimer — nous ouvre les portes des lendemains radieux que le grand Staline lui-même a bien failli ne pas promettre aux masses, agacé qu’il était ce jour-là que les Ricains aient la bombe avant lui. Une histoire à faire fusiller son majordome pour le remplacer par un robot.
 
Un grand merci à Thierry Marignac. Son nouveau roman "Milieu hostile" (Ed.Baleine) sera bientôt chroniqué ici. On peut aussi lire mes articles sur ses précédents titres : "Renegade boxing club", "Le pays où la mort est moins chère", "Maudit soit l'Eternel". Thierry Marignac a répondu au "Portrait Chinois". On peut lire une nouvelle inédite de cet auteur dans le n°10 du magazine L'Indic.

3.11.11

Limonov en négatif





(Vers traduits du russe par TM)


Мой отрицательный герой
Всегда находится со мной

Я пиво пью – он пиво пьёт
В моей квартире он живёт

С моими девушками спит
Мой темный член с него висит

Мой отрицательный герой
Его изящная спина
Сейчас в Ню-Йорке видна
На темной улице любой

Mon négatif héros
Est toujours sur mon dos

Je bois de la bière — de la bière il boit
Il vit chez moi

Il couche avec mes maîtresses
À son pubis mon membre obscur se dresse

Mon négatif héros
C'est à New York qu'on peut voir
Se découper l'élégante silhouette de son dos
Dans n'importe quelle rue où il fait noir.

Edward Limonov, Мой отрицательный герой, (Mon héros négatif), Poésies 1976-1982, New York-Paris, Glagol, Moscou, 1995.