Lac de Côme à la nuit tombante |
"La peur de penser en dehors des consignes a fait de la liberté une prison (…)"
"La Big Medicine — la technocratie médicale — nous doit des comptes car elle écrase le pathétique et s'empare de l'homme pour expérimenter un monde qui ne serait plus confronté à l'Abîme, un monde délivré de la pensée, mais Gouverné par les violents (…)"
La Fabrique de l'homme occidental, Pierre Legendre.
(Vers traduits du russe par Thierry Marignac)
Lorsque, au soir crépusculaire
Expire un ciel atrabilaire
Et sur la marche de l'autel
Jette un dernier rayon vermeil
Devant lui s'incline, esseulée
Seule, désireuse de chanter
Une épouse attristée,
Une fille trompée.
Qui connaît les ténèbres de l'âme des gens,
Leur mélancolie, leur ravissement?
C'est un émail bleu
Fermé à nos yeux.
Qui nous expliquera pourquoi
Chez cette épouse, toujours pleine de mélancolie,
Les yeux sont à demi assombris
Recouverts pourtant d'un lointain éclat?
Dans quel but sur ce front élevé
Les rides du doute ont tremblé
Et entre les sourcils se sont déposés, pesants,
Des siècles d'épuisement.
Et les lèvres souriantes
Dans quel but énigmatiques et tremblantes?
Et exigent un rêve passionnément,
Pour que de sourires, il ne s'agisse pas seulement?
Dans quel but en elle tant de charme sans bruit?
Pourquoi dans ses yeux des feux d'incendie?
Elle est pour nous un maladif cauchemar
Ou bien, c'est vrai, un amer cauchemar.
Pourquoi dans un rêve désespéré
Sur la marche de l'autel s'est-elle inclinée?
Que lui faut-il des hautes sphères
Des ombres blanches de l'atmosphère?
On ne sait pas! Les ténèbres nocturnes, profondément,
Le rêve — l'incendie, l'instant — les gémissements
Lorsqu'on voit poindre à l'Orient,
Les rayons d'une vie se renouvelant?
Nikolaï Goumiliev
Когда ж вечерняя заря
На темном небе угасает
И на ступени алтаря
Последний алый луч бросает,
Пред ним склоняется одна,
Одна, желавшая напева
Или печальная жена,
Или обманутая дева.
Кто знает мрак души людской,
Ее восторги и печали?
Они эмалью голубой
От нас закрытые скрижали.
Кто объяснит нам, почему
У той жены всегда печальной
Глаза являют полутьму,
Хотя и кроют отблеск дальний?
Зачем высокое чело
Дрожит морщинами сомненья,
И меж бровями залегло
Веков тяжелое томленье?
И улыбаются уста
Зачем загадочно и зыбко?
И страстно требует мечта,
Чтоб этой не было улыбки?
Зачем в ней столько тихих чар?
Зачем в очах огонь пожара?
Она для нас больной кошмар,
Иль правда, горестней кошмара.
Зачем, в отчаяньи мечты,
Она склонилась на ступени?
Что надо ей от высоты
И от воздушно-белой тени?
Не знаем! Мрак ночной глубок,
Мечта – пожар, мгновенья – стоны;
Когда ж забрезжится восток
Лучами жизни обновленной?
Николай Гумилев