Sélectionné pour le Grand Prix de littérature policière 2016!!! |
Comité
de Soutien des romanciers-critiques critiques
Un
spectre hante une partie de l’Europe littéraire : trois
romanciers-critiques critiques, dont une des plus saillantes caractéristiques
communes est une incapacité génétique à germano-pratiniser
— confinant à l’infirmité — auraient unis leurs forces pour faire parler
d’eux !… Issus d’une forme non reconnue de diversité, ils n’auraient, dit-on, aucun scrupule à vanter leurs
mérites respectifs :
—Christopher Gérard, helléniste
distingué, dandy impénitent qui se fait
tailler des costards à Savile Row,
auteur de l’extraordinaire Maugis,
roman qui contient tout le siècle dernier avec une superbe subtilité paradoxale,
dans l’esprit des grandes œuvres des années 1930, et du non moins confondant Le Songe d’Empédocle, où passent
d’autres aspects du XXe siècle et de ses errements sacrilèges.
—Pierric Guittaut, dit Le Plouc d’élite, qui tire de son
enracinement au centre sorcier d’une France en déliquescence une force
d’expression peu commune, une langue d’une limpidité dont on a perdu
l’habitude, une lucidité implacable sur la dérive post-moderne de la province
mondialisée, dont les deux premiers ouvrages, Beyrouth-sur-Loire, débordant d’une énergie qui excédait le
foutraque du premier roman, et La
Fille de la pluie, exercice de rigueur digne de Frédéric Dard, sont des polars éblouissants.
—Votre serviteur TM, et je ne ferai pas
l’injure aux lecteurs de ces colonnes de leur infliger ma bio, qu’ils consultent,
bande de tire-au-flanc, ma fiche Wiki.
En
effet, précisait Christopher
Gérard :
Un écrivain est reconnu et sacré tel par ses
pairs !…
De
plus, ajoutait Pierric Guittaut, dans son dernier bouquin :
La
solitude d'un adulte n'est pas que la somme du manque d'une chaleur au quotidien,
d'une présence autre, c'est aussi, surtout, le rétrécissement progressif d'un
univers mental. Seul, la pensée s'étrique. Les jours sont moins longs, les
années plus rapides et répétitives et l'on marche aigri et semi-conscient vers
sa tombe dans un crépuscule généralisé.
Alors on avait formé une bande !…
La
« re-malédiction du monde »
Je le savais depuis le départ, après la puissance
du premier, et la rigueur du second, le talent de Pierric Guittaut éclaterait
dans le troisième. Simple calcul d’éditeur. Le talent brut faisait ses classes.
Il suffisait de savoir l’identifier.
À partir du
microcosme berrichon, et ses superstitions ancestrales, Guittaut nous donne,
dans son roman D’Ombres et de flammes
— à travers la dérive d’un gendarme muté pour bavure vers la province natale
qu’il exècre — le mythe ressuscité dans les remugles post-modernes. Fabrice
Remangeon (le gendarme), s’est laissé aller à une violence coupable après un
accident hideux, avec délit de fuite, son humanité élémentaire (l’instinct de rétribution,
mal vu par la hiérarchie) prenant le pas sur le règlement. Renvoyé au village
qui l’a vu naître et grandir — loin des périphéries urbaines au fond desquelles
il cachait, et son chagrin d’avoir perdu sa femme, et sa répugnance pour les superstitions
entretenues par son père, célèbre rebouteux local — le gendarme affronte des
braconniers post-modernes, trafiquants de gibier génétiquement modifié
alimentant les chasses solognotes où les nantis de ce monde vont se distraire
en abattant du cerf stéroïdé importé de Nouvelle Zélande plus ou moins
légalement. Une de ses subordonnées perd la vie dans l’enquête. Parce que notre
gendarme doit également faire face à son passé. Et un sorcier braco local, s’en
prend à sa plus ancienne amie, qui vit toujours au village natal. Celle qu’il a
quittée pour la femme qu’il a épousée, disparue mystérieusement et qui le
hante. Notre gendarme, contre les malédictions du sorcier braco, en est réduit
à retourner vers l’antique sorcellerie de son père, celle qu’il a fuie. Il
préférait s’engager dans la gendarmerie. Son épouse disparue continue à le hanter. Combien
de rêves le taraudent peuplés d’elle et des amis trépassés, dans un retour à la
case départ qui le révulse, au beau milieu d’une enquête tragique que redouble
la lutte à mort contre le sorcier braco à coups de sortilèges. Mais il devra
sauver l’amie antérieure à celle-ci, la dernière femme encore vivante qui
tienne à lui, et l’a attendu, tout ce temps. Et s’abîmer corps et âme dans les
noirs secrets de son rebouteux de paternel. En chemin, il découvrira et sa
vocation, et ses racines niées si longtemps et la vérité sur feu sa femme. Le
retour du mythe coïncide avec celui de l’amour (un autre mythe).
Si je tiens Pierric pour un as, c’est
qu’il connaît tous les codes du genre, s’en sert de main de maître, se moque de
la politcorrectitude de mise dans la chapelle polar (un trait commun dans notre
internationale), et qu’en excédant les limites imposées par ce genre, il entre
par effraction dans la littérature, comme aucun de nos prétentiards manchetto-poulpistes,
si désireux d’académie sous le méprisable label roman noir n’en serait
capable. À travers son micro-drame de province, l'ami Guittaut nous dessine une géopolitique implacable. Les nullards sus-mentionnés peuvent s'aligner, tiens. Signe d'une révolution culturelle bienvenue dans la navrante église polar, D'Ombres et de flammes figure dans la première sélection du Grand Prix de Littérature Policière. Il était temps!…
TM,
mai 2016.