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1.9.21

Chanson de route du bagnard d'Essenine

 La "tristesse envoûtante" d'Essenine rappelle ici les notes de mélancolie cristallines d'Erik Satie, dans ce rythme de métrique décalée…



(Vers traduits du russe par ©Thierry Marignac)

Dans cette contrée, où les jaunes orties

Et les haies desséchées

Orphelines, vers les saules ont logé

Les isbas de bois des taillis

 

Là dans les champs, par-delà les ravines aux bleus fourrés,

Des lacs la verdure,

S’étendait longuement la route ensablée

Vers les monts sibériens d’envergure.

 

Chez le Morde et le Finnois, la Russie se perdait

La peur elle s’en cognait.

Et des gens sur cette route ont progressé,

Des gens, les chaînes aux pieds.



 

C’étaient tous des voleurs et des assassins

Ainsi jugeait le destin.

J’aimais leurs regards attristés

Dans les joues enfoncés.

 

Tant de méchanceté dans la joie chez les tueurs

Simple est leur cœur,

Mais grimacent sur leurs visages noircis

Leur bouches bleuies.

 

Mais un rêve je caresse, le cachant,

De mon cœur la pureté.

Mais un jour quelqu’un je vais égorger

Sous l’automnal sifflement.

Datcha de Staline


 

Et moi, sur la dune battue par les vents

Sur ce terrain sablonneux,

On me mènera la corde au cou enserrant

Du cafard tomber amoureux.

 

Et alors, avec un sourire en passant,

La poitrine redressant,

Me lèche la langue du mauvais temps,

Vécu chemin faisant.

Sergueï Essenine, 1915.

 

В том краюгде желтая крапива"

В том краютде желтая крапива    

И сухой плетень,

Приютились к вербам сиротливо    

Избы деревень


Там в поляхза синей гущей лога,    

В зелени озер,

Пролегла песчаная дорога    

До сибирских гор

 

Затерялась Русь в Мордве и Чуди,    

Нипочем ей страх.

И идут по той дороге люди,    

Люди в кандалах

 

Все они убийцы или воры,    

Как судил им рок.

Полюбил я грустные их взоры    

С впадинами щек

 

Много зла от радости в убийцах,    

Их сердца просты,

Но кривятся в почернелых лицах    

Голубые рты

 

Я одну мечтускрываянежу,    

Что я сердцем чист.

Но и я кого-нибудь зарежу    

Под осенний свист

 

И меня по ветряному свею,    

По тому ль песку,

Поведут с веревкою на шее    

Полюбить тоску

 

И когда с улыбкой мимоходом    

Распрямлю я грудь

Языком залижет непогода    

Прожитой мой путь

 

Сергей Эсенин,1915