Mark Ames, journaliste d'élite, nous donne son point de vue, et nous raconte l'histoire du FBI, bien avant Comey et Trump, cet organe du maintien de l'ordre était déjà une drôle d'officine…
Les lecteurs anglophones retrouveront son article en VO au lien suivant: kompromat/
http://exiledonline.com/russia-blog-6-the-fbi-has-no-legal-charter-but-lots-of-kompromat/
LE
FBI N’A PAS DE CHARTE LÉGALE, MAIS DES TAS DE KOMPROMAT.
Par Mark
Ames,
(Traduit de l’Américain par TM)
J’ai
fait l’erreur d’écouter NPR (National
Public Radio) la semaine dernière pour déterminer ce que la sagesse
conventionnelle avait à dire sur le limogeage de Comey par Trump, supposant que
le ton de leurs voix Mister Rogers sous Actifed réfrèneraient un peu l’hystérie
ambiante. Et en apparence c’était le cas — les animateurs et invités de NPR ne couinaient
pas directement « C’est la fin du monde ! Nous allons tous nous faire égorger comme des agneaux ! », comme ils en ont pris l'habitude sur CNN. Mais ils criaient
« Au feu ! » d’une certaine manière, si l’on sait reconnaître
les variations infimes de la voix NPR lambda sous Actifed.
L’animateur
du programme de la journée de la NPR a demandé quel était le sérieux et à quel
point la décision de Trump de limoger le chef du FBI était sans précédent. La
réponse des invités était étrange : ils parlaient de « l’État de
droit », et de « viol de la Constitution », mais ensuite ils sont
passés à une « violation des normes » par Trump — et vice versa,
comme si « loi » et « normes » étaient des termes
interchangeables. L’un des invités admit que le limogeage de Comey par Trump
était 100% légal, mais cela ne semblait pas compter dans sa rhétorique au sujet de Trump quittant
l’État de droit pour une dictature de style poutinien. Ces mecs ne passeraient
pas l’examen d’instruction civique en classe de troisième, mais ils étaient là
à noyer le poisson. Ce qui comptait, c’était leur panique et l’outrage qu’ils
affichaient — je ne suis pas sûr que quiconque s’intéresse vraiment à la
légalité, ou à l’histoire légale, politique, ou « normative » du FBI.
Pour
commencer, le FBI ne colle pas avec les concepts de
« constitutionnel » ou « d’État de droit ». Pour la simple
raison qu’aucune loi ne l’a jamais
fondé. Les législateurs américains ont refusé d’approuver le FBI, il y a plus
d’un siècle, lorsque la proposition a été soumise par Teddy Roosevelt. Il a donc
ignoré le Congrès, a poursuivi son projet et l’a établi par fait du prince.
C’est une chose dont la cohorte des défenseurs des libertés civiles déteste
discuter — le fait que le pouvoir politique centralisé des USA soit dans
l’exécutif, un trait du système constitutionnel institué par les Pères Fondateurs.
À
la fin des années 1970, la fin de notre brève Glastnost, on a beaucoup évoqué à Washington la possibilité de
créer enfin une charte légale du FBI — 70 ans après sa fondation. Beaucoup
d’encre a coulé dans la tentative de transformer le FBI en quelque chose de
légal et de défini, au-delà de la police extra-légale et secrète qu’il était. Si l’on veut jouer les
archéologues de l’histoire récente de l’Amérique on peut trouver ça dans les
archives du New York Times, des
articles intitulés « Le projet d’une charte du FBI met des limites à ses
méthodes d’investigation »:
"L’administration Carter enverra bientôt au
Congrès la première charte définissant les activités du FBI. La charte en
question impose des restrictions importantes mais pas absolues sur l’emploi de
techniques d’investigation controversées, comprenant l’usage d’informateurs,
d’agents secrets et d’activité criminelle cachée.
La charte spécifie également les
devoirs et les pouvoirs du FBI, fixant des procédures et critères précis pour l’ouverture
et la conduite des investigations. Elle impose au FBI d’observer les droits
constitutionnels et d’établir des garde-fous, contre le harcèlement sans
contrôle, l’effraction et autres violations."
…suivis
de l’inévitable lamentation, comme cet éditorial du Christian Science Monitor, un an plus tard, « N’oubliez pas la charte du FBI ».
Que nous avons bien entendu oubliée — c’était le sens et la valeur de la présidence Reagan
pour la réaction post-Glastnost : l’oubli. Comme l’a écrit l’historien
Athan Theoharis : « Après 1981, aucune des propositions de Congrès
sur la charte du FBI n’a plus été examinée ».
Les
origines du FBI ont été voilées à la fois à cause de sa douteuse légalité et en
raison de son but originel — aider un président à livrer bataille aux tout-puissants
capitalistes américains. Teddy Roosevelt n’était pas un gauchiste radical —
c’était un Républicain progressiste, ce qui sonne aujourd’hui comme un oxymore,
mais qui constituait une politique grand public et dans une phase ascendante à l’époque. Roosevelt
fut probablement le premier président depuis Andrew Jackson à essayer de briser
la concentration du pouvoir de la richesse, du moins en partie. Il pouvait se
montrer brutalement anti-travailleur, mais tels étaient aussi les puissants
capitalistes qu’il combattait, ainsi que toutes les structures du pouvoir
étatique. Il rencontrait peu d’opposition en poursuivant ses ambitions
impériales social-darwinistes en dehors des frontière américaines. Mais il
avait beaucoup plus de difficulté quand il s’agissait de combattre les
puissants capitalistes chez lui, qui se mettaient en travers de l’obsession la
plus honorable de Roosevelt : préserver les forêts, les parcs et les
domaines publics des cupides capitalistes. Un memorandum adressé très tôt à
Hoover explique les origines du FBI :
"Roosevelt dans son style dynamique
caractéristique, affirma que les pillards du domaine public seraient poursuivis
et jugés."
D’après
le reporter du New York Times Tim
Wiener, Enemies : A History of the
FBI, ce fut le scandale de la fraude sur les terres en Oregon de 1905-6 qui
donna l’idée du FBI à Teddy Roosevelt.
Le scandale en question impliquait des politiciens de l’Oregon, qui aidaient le
magnat des chemins de fer Edward Harriman à vendre des terres forestières de
l’Oregon à des trusts forestiers, et se termina en déférant à la justice un
sénateur de l’État, et les deux seuls représentants de l’Oregon au parlement,
sans compter des dizaines d’autres citoyens de l’Oregon. Au fond, ils
dévastaient des terres et des forêts du domaine public de l’État comme des
colonisateurs font d’un pays étrangers — et ça restait en travers de l’estomac
de TR.
Il
voulait que son Attorney general —
Charles Bonaparte (oui, c’était un véritable descendant de ce Bonaparte) — lui fasse un rapport complet sur les endémiques
escroqueries sur les terres des seigneur de la guerre, qui défiguraient l’Ouest
américain et menaçaient sa vision de la conservation de la terre et des forêts.
Bonaparte créa donc une équipe d’enquêteurs du Service Secret américain, mais
TR jugea que leur rapport disculpait les coupables et proposa un nouveau
service d’enquête fédéral dans le département de Bonaparte qui ne rendrait compte qu’à
l’Attorney general.
Jusque
là, le gouvernement des Etats-Unis devait se fier à des firmes privées, très
douées pour briser les grèves, matraquer les ouvriers et tirer sur leurs
organisateurs, comme la célèbre Pinkerton, mais pas très fortes quand il
s’agissait de s’en prendre aux barons de la finance, qui figuraient parmi les
clients importants de ces agences de détectives privées.
Au
début de l’année 1908, Bonaparte écrivit au Congrès pour lui demander l’autorité
légale (et les fonds) permettant de créer une « une force permanente
d’enquêteurs ». Le Congrès devait alors se cabrer, dénonçant cette idée
comme un projet de créer une Okhrana
américaine. Le Démocrate Joseph Sherley déclara que « espionner les
gens et s‘immiscer dans ce qui devrait être considéré comme leurs affaires
privées » était contraire aux
« idées américaines de gouvernement » ; le Républicain George Waldo, de New York, dit
que le FBI qu’on proposait constituerait une « atteinte considérable à la
liberté et aux institutions libres si un département secret de ce style
surgissait dans ce pays, comme il existe en Russie ».
La
réaction du Congrès alla par conséquent dans le sens contraire, interdisant à
Bonaparte de dépenser quelques fonds que ce soit sur le FBI. Un autre membre du
Congrès écrivit un autre alinéa du budget interdisant au Département de la
Justice d’embaucher des fonctionnaires du Service Secret pour quelque FBI que
ce soit. Bonaparte attendit donc les vacances d’été du Congrès, mettant à
gauche des fonds de la Justice, et recruta des agents du Service Secret pour
créer un nouveau service fédéral avec 34 agents. C’est ainsi qu’est né le FBI.
Le Congrès n’en fut informé qu’en fin d’année 1908, par quelques lignes d’un
rapport ordinaire —« Au fait, j’ai oublié de vous dire… ».
L’histoire
sordide du service extra-légal de police américain est avant tout une histoire
de propagation de panique xénophobe, d’espionnage domestique illégal, de rafles
de masse, et de projets de rafles de masse, de complots visant à piéger les
citoyens, et de semer ce que les Russes appellent « Kompromat » — des
infos compromettantes sur la vie sexuelle de la cible — pour faire chanter ou
détruire des figures politiques américaines que le FBI n’aimait pas.
La
première victime politique des « Kompromat » de J. Edgar Hoover fut Louis Post secrétaire-adjoint
au Travail sous Woodrow Wilson. Le crime de Post était d’avoir relâché plus de
1000 soi-disant « Rouges » des lieux de détention, à la fin des arrestations de masse du FBI, lorsqu’ils
avaient emprisonné et expulsé des milliers de gens soupçonnés d’être
communistes. La purge de masse entreprise par le FBI commença avec le soutien
populaire en 1919, mais déjà au milieu de l’année 1920, certains (pas le FBI)
commençaient à être mal à l’aise. Une opposition juridique aux purges et
expulsions de masse du FBI à Boston se conclut par la dénonciation du FBI par
un juge fédéral. Après ce verdict, le secrétaire-adjoint Post, un progressiste
bienveillant de 71 ans, passa les affaires en revue et contre 1500 détenus que
le FBI voulait expulser et se rendit compte qu’on avait absolument rien dans
75% des affaires. Son investigation menaçait de ruiner les poursuites
entreprises par le FBI de milliers de gens soupçonnés d’être contrôlés par
Moscou.
Alors,
l’un des plus ambitieux jeunes agents du FBI, J. Edgar Hoover rassembla des
« kompromat » sur Post et ses liens supposés avec d’autres supposés
gauchistes liés à Moscou, avant de refiler le dossier à la Chambre des Représentants contrôlée par les
Républicains — qui annonça rapidement qu’elle entendrait Post pour enquêter sur
lui en tant qu’agent de gauche subversif. La Chambre tenta de mettre Post en accusation
mais il se défendit. Son avocat compara les persécuteurs de Post à l’okhrana (La Russie, encore !)
« En Amérique, nous sommes tombés au niveau de la Russie sous le régime
tsariste », décrivant la campagne de calomnie du FBI comme «encore
plus basse dans ses méthodes que les anciens officiels russes ».
Sous
le président Harding, le FBI eut un nouveau patron, William Burns, qui fit les
gros titres en faisant porter le chapeau de l’attaque terroriste à Wall Street
de 1920 qui fit 34 victimes à un complot du Kremlin. Le FBI prétendait avoir
une source fiable qui leur avait confié que Lénine avait envoyé 30 000 $ à la
mission diplomatique soviet de New York, plus tard distribuée à quatre agents
communistes sur place qui avaient organisé l’attentat à Wall Street. Cette
source prétendait avait parlé à Lénine en personne, se vantant d’avoir eu un
tel succès avec sa bombe qu’il avait commandé d’autres attentats.
Le
seul problème était que la source fiable du FBI, un petit délinquant juif
polonais nommé Wolf Lindenfeld se révéla un pipeauteur d’enfer — surnommé
« Linde bidon » — qui pensait que sa confession fabriquée de toutes
pièces le sortirait des prisons polonaises et lui permettrait une vie
confortable à New York.
En
1923, le FBI avait à peu près annihilé les mouvements communistes et de
travailleurs radicaux en Amérique — ce qui l’autorisait à se concentrer sur un
autre de ses passe-temps favoris : espionner et détruire les opposants
politiques. Le FBI espionna les sénateurs américains qui soutenaient
l’ouverture de relations diplomatiques avec l’URSS : William Borah, de
l’Idaho, président du comité des relations avec l’étranger ; Thomas Walsh
de comité judiciaire, et Burton K. Wheeler, le sénateur populiste de la prairie
du Montana, qui s’était rendu en URSS et voulaient des relations diplomatiques.
L’Attorney general corrompu jusqu'au trognon de
Harding — Dougherty — dénonça Wheeler comme « le dirigeant communiste au
Sénat, pas plus démocrate que son camarade Staline à Moscou ». Dougherty
accusa Wheeler de faire partie d’un complot visant à « attirer autant de
membres du Sénat que possible et de diffuser à Washington, et dans les
vestiaires du Sénat un gaz aussi mortel que celui qui a tué tant de braves
soldats durant la dernière guerre ».
Hoover,
à présent un dignitaire haut placé du FBI, nourrissait tranquillement les
journalistes de « Kompromat » en particulier un reporter de
Associated Press nommé Richard Whitney qui publia en 1924, un livre à
succès : « Les Rouges en Amérique » avançant que les agents du
Kremlin avait une « influence pénétrante dans toutes les institutions
américaines ; ils ont infiltré tous les aspects de la vie
américaine ». Whitney avait dit que Charlie Chaplin était un agent du
Kremlin, avec Felix Frankfurter et les membres du Sénat qui voulaient une
reconnaissance de l’URSS. Ce qui tua tout espoir de reconnaissance diplomatique
pendant la décennie suivante.
Puis
éclatèrent les scandales de l’administration Harding — notamment celui des
anciens combattants, des pots-de-vin au plus haut niveau. Lorsque les sénateurs
Wheeler et Walsh ouvrirent des enquêtes, le FBI envoya des agents pour
rassembler des accusations de corruption bidons contre Wheeler lui-même. Elles étaient manifestement fabriquées et un jury le disculpa. Alors que l’Attorney General Dougherty fut inculpé d’escroquerie et obligé
de démissionner, comme le fut son patron du FBI Burns — mais pas son subordonné
Hoover, qui restait dans l’ombre.
Sous
Franklin Roosevelt, les pouvoirs du FBI et ses programmes de surveillance de
masse connurent une expansion sans
précédent. Lorsque Roosevelt mourut et que Truman prit sa place, il fut à la
fois intrigué et horrifié par ce pouvoir, lorsque Hoover chercha à se faire
bien voir du président avec des dossiers compromettants sur d’autres figures
politiques. Quelques semaines après son arrivée aux affaires, Truman écrivait
dans son journal :
« Nous ne voulons pas d’une Gestapo ou
d’une Police Secrète. Le FBI s’oriente dans cette direction. Ils s’occupent de
scandales sexuels et de chantage ouvert… Cela doit cesser… »
Avec la Guerre Froide, le FBI entretint une
véritable obsession sur les homosexuels en tant que Cinquième Colonne aux
ordres de Moscou. Les homosexuels, pensait le FBI, était susceptible d’être compromis
par le Kremlin — alors le FBI a rassemblé et diffusé ses propres dossiers
compromettants sur des homosexuels supposés, soi-disant pour protéger
l’Amérique du Kremlin. Au début des années 1950, Hoover a lancé le Programme
des Déviants Sexuels pour espionner les homosexuels et les purger de la vie publique américaine.
Le FBI rédigea 300 000 pages de dossiers sur des homosexuels supposés et
contacta leurs employeurs, la police locale et les universités « pour expulser
les homosexuels de toutes les institutions étatiques, d’enseignement supérieur,
et de maintien de l’ordre dans tout le pays » selon le livre de Tim Weiner
Enermies. Personne, en dehors du FBI,
ne sait combien de vies ont été détruites en l’occurrence sauf Hoover — qui ne
se maria jamais, vécut avec sa mère jusqu’à 40 ans et ne se déplaçait jamais
sans son « ami » Clyde Tolson.
Au
cours de l’élection de 1952, Hoover était si désireux de venir en aide aux
Républicains et à Eisenhower qu’il rassembla et dissémina un
« Kompromat » de 19 pages avançant que son rival du parti Démocrate
Adlai Stevenson était homosexuel. Le dossier du FBI était gardé dans la section
du Programme des Déviants Sexuels — il comprenait des ragots diffamatoires,
prétendant que Stevenson était l’un des "homosexuels les plus notoires de
l’Illinois ", surnommé « Adeline » dans les milieux gays.
Dans
les années 1960, Hoover et les patrons du FBI rassemblaient des
« Kompromats » sur les vies sexuelles de JFK et Martin Luther King.
Hoover en montra quelques-uns à Bob Kennedy, prétendant le
« prévenir » que le président était vulnérable au chantage. C’était en
réalité une façon pour Hoover de faire comprendre aux Kennedy qu’il méprisait,
qu’il pouvait les détruire, s’ils le viraient, façon Comey, de son siège de patron
du FBI. Les « Kompromats » de Hoover sur la vie sexuelle de Martin
Luther King était devenus une obsession de Hoover. Il pensait à présent que les
Noirs américains, et non plus les homosexuels, présentaient la plus grande
menace de devenir la Cinquième Colonne du Kremlin. Le FBI mit la vie privée de
Martin Luther King sur écoute, accumulant les enregistrements des liaisons de
MLK avec ses maîtresses, qu’un membre haut placé du FBI finit par envoyer à son
épouse, avec une lettre pressant MLK de se suicider.
Après
l’assassinat de JFK, lorsque Bob Kennedy se présenta au Sénat en 1964, il
devait raconter une autre histoire dérangeante de « Kompromat » FBI
que le président Johnson partagea avec lui pendant sa campagne. Des rapports du
FBI qui énuméraient en détail « la débauche sexuelle de membres du Sénat et
de la Chambre fréquentant des prostituées ». LBJ demanda à Bob
Kennedy si l’on devait laisser fuir ces « Kompromats » pour détruire
les candidats républicains avant les élections de 1964. Bob Kennedy devait
écrire :
« Il me dit qu’il avait passé
toute la soirée à lire les dossiers du FBI sur ces gens. Et Lyndon parle de ces
infos à tout le monde. Et c’est dangereux, bien entendu ».
Bob Kennedy, Attorney general, avait lui
–même vu un certains nombre de ces dossiers, mais il était totalement opposé à
leur divulgation — comme, par exemple, les dossiers sur les putes urinant à
Moscou dans la chambre de Trump — parce que « cela détruirait la confiance
des citoyens américains dans leur gouvernement et ferait de nous la risée du
monde entier ».
Imaginez-moi
ça.
Ce
qui me ramène à la grosse analogie que tous les tâcherons de la presse ont
beuglé la semaine dernière, disant que Trump était « nixonien » quand
il a viré Comey. En fait, Trump a fait l’inverse de ce que fit Nixon, qui
souhaitait limoger Hoover en 1971-72. Sauf qu’il craignait trop le
« Kompromat » que Hoover avait peut-être sur lui pour le faire. Nixon
s’était brouillé avec son vieil ami et autrefois mentor J. Edgar Hoover en
1971, lorsque le vieux chef malade du FBI avait refusé de se joindre à
l’enquête Daniel ELLS/Pentagone, surtout après le verdict favorable au New York Times de la Cour Suprême. Une
des raisons pour lesquelles Nixon avait créé sa propre équipe de plombiers
cambrioleurs, était le fait perturbant que le patron du FBI soit devenu un peu brumeux dans sa dernière année sur cette
planète — et ça rendait Nixon fou furieux.
Nixon
a appelé son chef de cabinet Haldeman :
« Nixon : J’ai discuté avec Hoover
hier soir, et il ne
va pas
poursuivre Ellsberg avec la vigueur que je voudrais. Quelque chose le ralentit.
Haldeman : Tu crois que le FBI s’en lave
les mains ?
Nixon : Ouais, surtout du complot. Je veux
poursuivre tout le monde. Ellsberg ne m’intéresse pas particulièrement, mais on
doit s’en prendre à tous les membres de cette conspiration ».
Les ambitieux
adjoints de Hoover étaient reniflaient l'odeur du sang et cherchaient à prendre sa place.
Son numéro 3, Bill Sullivan (celui qui avait envoyé les bandes magnétiques sur
la vie sexuelle de Martin Luther King, le pressant de se suicider) était
particulièrement désireux de se débarrasser de Hoover, pour le remplacer.
Alors, tandis que Hoover bétonnait l’enquête sur Ellsberg, Sullivan s’est
pointé dans un bureau du Ministère de la Justice avec deux mallettes pleines de
transcriptions d’enregistrements illégaux de journalistes et de leur propre
personnel commandés par Kissinger et Nixon. Ces enregistrements avaient été
commandés durant les premiers mois de Nixon à la Maison Blanche pour empêcher des fuites d’une ampleur sans précédent. Sullivan, avait dérobé ces fuites à
Hoover et dit au ministère de la Justice qu’elles devaient être dissimulées à
celui-ci qui se promettait de s’en servir pour faire chanter Nixon.
Nixon
décida de virer Hoover le jour suivant, en septembre 1971. Mais le jour
suivant, Nixon prit peur. Il tenta alors
de convaincre son Attorney General
John Mitchell de virer Hoover. Mais Mitchell lui répondit que seul le président
pouvait le faire. Alors Nixon prit le petit-déjeuner avec Hoover et se
dégonfla. Hoover flatta Nixon et lui confia que voir le président réélu était
son vœu le plus cher. Nixon n’avait plus qu’à s’écraser. Le jour suivant Hoover
limogea son numéro 3 Sullivan sans cérémonie, en lui fermant et la porte de l’immeuble
et celle de son bureau au nez pour qu’il ne puisse rien embarquer avec lui.
Sullivan était fini.
Mark Ames, 2017