22.3.12

Les égouts de la post-démocratie occidentale


Groupe de soldats américains "réprimandés" après coup, en Afghanistan

         Obscénité de la « démocratie »
         Une fois n’est pas coutume, votre bien obligé se permettra une intervention « politique ». En effet, dans le contexte nauséabond et farci de scandales politico-financiers à tiroirs multiples d’élections prochaines, un président d’un pays occidental « démocratique » vient d’annoncer en public que quiconque suivrait des sites « terroristes » sur Internet serait « puni pénalement ». Ces phrases lourdes de conséquences signifient tout d’abord que tout un chacun est surveillé quotidiennement dans ses explorations sur l’outil ultime, ainsi nous le présente-t-on, de la démocratie, puisqu’outil du savoir, dont nous étions, pauvres de nous, dépourvus il y a assez peu de temps (quinze ans ?…). Cette première révélation publique (on se doutait du flicquage, après tout Internet a été inventé par l’armée américaine…) est en elle-même assez choquante. De même, il est choquant qu’un président compromis des dizaines de fois par ses proches dans des combines dont on n’a pas encore le fin mot (et peut-être jamais, les néo-cons sont passés maîtres dans l’art de rester impunis, voir les US), mais qui, en une occasion au moins comporte mort d’homme (Karachi), ait le front d’annoncer tout de go que ses concitoyens sont surveillés pas à pas pour leur propre bien, dont cet élu du ciel est le garant — c’est un scandale. Toute cette affaire est justifiée par une bien triste occurrence, néanmoins elle aussi suspecte : le cinglé de Toulouse était dans le collimateur des services spéciaux depuis un certain temps. Pourquoi a-t-il choisi précisément ce moment pour agir, pourquoi est-ce que les services affectés à sa surveillance n’ont rien vu venir, pourquoi, au-delà de l’anecdote policière, l’a-t-on démasqué après les forfaits commis — mystère. Les images diffusées largement (à la suite du fait divers) des camps d’entraînement afghans sont des images mille fois diffusées auparavant, sans aucun rapport direct avec le criminel. Pure propagande. Elles sont loin d’être innocentes. On confectionne un 11 septembre français. Qu'il soit prémédité ou non ne change rien à l'usage qui en est fait.
Dans le même temps, les forces occidentales en Afghanistan financent plus ou moins directement, à travers la famille Karzaï, les narcotrafiquants, et au-delà, les Talibans eux-mêmes. Je n’en veux pour preuve que ce reportage du New York Times, vieux d’un an ou deux,  où le frère du président afghan, chef d’une firme de sécurité protégeant les convois de l’OTAN à partir du Pakistan était soupçonné de payer les Talibans pour laisser passer les camions vitaux aux forces occidentales, et soupçonné d’autre part de tremper dans le trafic des opiacés à destinations de l’Europe et des Etats-Unis. Comme dans toutes les guerres américaines (voir le Vietnam où les GI's camés finançaient le Vietcong trafiquant d'héro, où les sbires de Lon Nol — fantoche US au Cambodge — vendaient les armes américaines à ceux de Pol Pot !… Voir Cuba, où la CIA a commencé par soutenir Castro pour se débarrasser de Batista, un peu trop compromis avec les Familles de la Mafia new-yorkaise…), le serpent se mordait la queue. Quant à mettre en doute la corruption dans un tel pays, laissez-moi rire. On entretenait donc ce que l’on prétendait combattre, parce que cet « engagement » a la fonction précise de militariser nos sociétés plus avant.
Loukachenko, dictateur "au grand jour" de Biélorussie
On peut donc légitimement se poser la question, et exiger des éclaircissements, quant à la fonction de cet assassin miraculeux tombant à point nommé pour un parti dont les chances sont compromises. Surtout et d’autant plus lorsque les conclusions de l’équipe au pouvoir sont plus de fichage, plus de surveillance, légitimés par des gouvernants eux-mêmes apparemment au-dessus des lois, suspects au premier chef d’infractions graves au droit des gens.
Et si je suis bourré, et que j’ai envie de m’éclater avec les djihadistes ou les skins, ou les satanistes zoroastriens de gauche, que j'ai besoin de faire des recherches sur l'IRA ou l'IRGOUN pour un roman, que je vais sur les sites de mes copains Leroy ou Quadruppani qui appellent l’un à « brûler les banques », l’autre à « la furie prolétarienne balayant le vieux monde », je vais aller en taule, soupçonné d’être un assassin potentiel, moi qui ne connaît rien aux armes ?… On me mettra à l’amende ?…
On est là, dans ces ersatz de « démocraties » ?… Un changement d’équipe au pouvoir ne transformera rien. On n’a jamais vu une mesure policière abolie par les successeurs (si vertueux se disent-ils), ni un impôt, sauf pour les riches.
Il y a décidément quelque chose de pourri au royaume occidental où la « liberté » affichée se change tous les jours un peu plus en son contraire.
Le psychopathe de Toulouse, éminemment suspect selon moi (combien de cinglés n’ont-ils pas été manipulés à travers l’Histoire par les services spécialisés ?…) est-il un résultat de sa propre pathologie,  de ce monde chaque jour plus glaçant d’exclusion et de solitude, ou bien un machiavélisme orchestré, je n’en sais évidemment rien. Mais dans les circonstances que je viens de décrire où ceux qui se parent de vertu ont très probablement du sang sur les mains, cette tragédie ne justifie en aucun cas une surveillance accrue de nos corps et esprits déjà filés pas à pas. Et d'autant moins quand on nous dit du même souffle que cette surveillance ne sert à rien.
Obscénité de toutes parts. Rien d’autre.
Thierry Marignac, mars 2012

P.S en forme de mise à jour :
Interview du candidat social-dème dans le Monde du 29-03-2012 :
"Yves Bonnet, l'ancien patron de la direction de la surveillance du territoire (DST, aujourd'hui remplacée par la direction centrale du renseignement intérieur, DCRI), soupçonne Mohamed Merah d'avoir été un "indic" de la DCRI. Cette thèse vous paraît-elle crédible ?
Si nous n'étions pas en campagne, il y aurait déjà, au plan parlementaire, des demandes d'information. Après l'élection, des commissions d'enquête devront nécessairement se pencher sur toutes les questions. Je m'engage, si je suis élu, à ce que toute la clarté soit faite sur les éventuelles failles. J'en tirerai toutes les conclusions."

P.P.S. À CEUX QUI M'ACCUSENT DE "COMPLOTISME":
Apparemment, un policier, et non des moindres, semble avoir des doutes. Il est hors de question de soupçonner  une guerre des polices, ce serait céder à la théorie du complot, n'est-ce pas ?
De même, c'est certainement un hasard, si l'équipe néo-con se déchaîne dans la journée sur l'affaire DSK en contrefeu. Loin de moi, du reste, l'idée de voir les sociaux-dèmes comme des enfants de chœur. L'Histoire nous a prouvé le contraire plus d'une fois.
Pour nos lecteurs qui lisent l'anglais, Haaretz, journal israelien publiait avant-hier un article relatant le séjour du cinglé de Toulouse en Israel, sous l'œil du Shin-Beth :
http://www.haaretz.com/news/diplomacy-defense/shin-bet-security-service-confirms-toulouse-gunman-spent-time-in-israel-1.420810
Ce terroriste a eu (quelque temps) une chance folle : il est passé sous la loupe de quatre ou cinq des services de sécurité parmi les plus paranos du monde qui l'ont laissé filer, trop respectueux de l'état de droit.
En comparaison, les anarchos tralalas de Tarnac, qui faisaient pousser des légumes bios, montaient des bibliothèques, buvaient du vin sans souffre en préparant une insurrection certes invisible, se sont retrouvés en taule en une demie-journée après avoir mis deux trombones dans un aiguillage.
Ne cédons pas à la théorie du complot. Attendons les explications.